L’Europe, forteresse en construction

Les pays de l’UE harmonisent leurs législations. Avec pour unique objectif d’interdire l’accès de leur territoire aux clandestins. Même l’Espagne, longtemps très accueillante, s’y met.

Publié le 26 novembre 2008 Lecture : 2 minutes.

Les immigrés seront de moins en moins à la fête dans cette Europe en passe de se muer en forteresse, même si Brice Hortefeux, le ministre français de l’Immigration et de l’Identité nationale, prétend seulement en finir avec l’« Europe passoire ». Fini les régularisations massives de clandestins, comme en Italie (350 000) et en Espagne (600 000), en 2005-2006. Place aux « lois du retour » et à l’immigration « choisie ». Ce qui, en clair, signifie qu’un maximum d’obstacles sont en train d’être dressés pour empêcher que le Vieux Continent n’accueille « toute la misère du monde », selon le mot de l’ancien Premier ministre français Michel Rocard.

Au départ, une peur sourde s’est répandue, en Europe comme aux États-Unis, à l’égard d’un phénomène migratoire perçu comme « un problème ». Une enquête du German Marshall Fund of United States publiée le 17 novembre confirme que les citoyens des pays riches perçoivent très souvent les immigrés illégaux comme une menace, soit pour les personnes (augmentation de la criminalité), soit pour l’emploi. Logiquement, ces pulsions xénophobes se sont, depuis une trentaine d’années, traduites par des poussées de l’extrême droite dans une série de pays : Royaume-Uni, Allemagne, France, Autriche, Belgique…

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Cacophonie réglementaire

D’abord favorables à une immigration « utilitaire » destinée à pourvoir les emplois dont leurs citoyens ne voulaient pas ou plus, les gouvernements européens ont alors tenté d’ordonner ou de ralentir ce flux. D’où une certaine cacophonie réglementaire, l’accueil des travailleurs migrants étant plus ouvert dans les pays du nord de l’Europe – il est vrai moins exposés – que dans ceux du sud. Partout, les regroupements familiaux sont rendus plus difficiles et exigent des conditions de ressources, de logement, voire de maîtrise de la langue. Les contrats d’intégration fleurissent avec pour objectif avoué de fermer le robinet de l’immigration clandestine.

Le 16 octobre, l’Europe a adopté un « pacte sur l’immigration et l’asile » censé définir « une politique juste, efficace et cohérente ». Mais ces euphémismes ne doivent pas faire illusion : c’est la logique sécuritaire qui l’emporte. Frontex, la police des frontières communautaires, est devenue tellement efficace qu’il faut mettre un peu d’humanité et de respect des droits élémentaires dans ses rouages !

Longtemps accueillante, l’Espagne offre désormais aux étrangers extracommunautaires inscrits au chômage deux ans d’indemnités s’ils acceptent de quitter le pays et de ne pas y revenir avant trois ans. En 2009, la France mettra en place un contrat d’accueil et d’intégration (avec apprentissage obligatoire de l’hymne national), mais réduit simultanément de 195 millions à 78 millions d’euros les crédits destinés à faciliter l’intégration des travailleurs étrangers.

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Bref, l’Europe n’arrive pas à choisir entre l’immigration, dont elle a besoin économiquement et socialement, et les peurs exacerbées par la crise financière et économique mondiale. Les étrangers les plus démunis feront les frais de ces palinodies.

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