Le platine décroche la médaille d’or

Publié le 8 décembre 2008 Lecture : 4 minutes.

S’il ne fallait retenir qu’un enseignement de notre classement des 25 premières entreprises minières du continent, ce serait celui-ci : la très renommée compagnie diamantifère De Beers Consolidated Mines, filiale sud-africaine du géant De Beers, a été dépassée par sa consœur Anglo Platinum. Cette dernière fait partie des spécialistes du platine qui ont profité de l’explosion des cours de ce métal très demandé par l’industrie automobile et dont l’Afrique du Sud est le premier producteur mondial. Les chiffres d’affaires d’Anglo Platinum, d’Impala Platinum et de Northam Platinum ont bondi respectivement de 23,6 %, 85,3 % et 58,1 %. À elles seules, ces trois compagnies ont généré en 2007 environ 70 % des profits cumulés des 25 plus grosses entreprises minières africaines. Cette bonne santé des opérateurs miniers africains se reflète, à des degrés plus ou moins importants, dans l’ensemble de notre classement : ainsi, les revenus cumulés des 25 ont progressé de 21,2 % entre 2006 et 2007, conséquence, pour l’essentiel, de la flambée des cours. La demande pour les principaux minerais africains a en effet été portée par l’explosion de la demande asiatique en général et chinoise en particulier. Au-delà du platine, c’est en effet la quasi-totalité des minerais qui ont vu leurs cours bondir. Celui du manganèse a quasiment doublé en 2007, une bonne nouvelle pour la Compagnie minière de l’Ogooué (Comilog), qui opère le gisement de manganèse de Moanda, au Gabon. La filiale du groupe français Eramet et de l’État gabonais a vu sa production augmenter de 12 %, son chiffre d’affaires progresser de 40 % et son résultat d’exploitation doubler. Mi-2008, l’année en cours semblait se présenter également sous de très bons auspices, l’objectif de la Comilog étant d’extraire 4 millions de tonnes de manganèse en 2008, contre 3,3 millions en 2007.

Au Maroc, un autre géant national, l’Office chérifien des phosphates (OCP), a lui aussi largement profité de la hausse des cours, dont le royaume est le premier exportateur mondial. Le chiffre d’affaires de l’OCP a encore grimpé en 2007 pour approcher les 3 milliards de dollars, contre 2,2 milliards l’année précédente. Mieux, transformé en société anonyme et désireux d’attirer davantage d’investisseurs étrangers pour développer la transformation locale de phosphates, le groupe devrait doubler son chiffre d’affaires en 2008. Autre entité portée par la flambée des prix, Konkola Copper Mines, société exploitant la principale mine de cuivre de Zambie et filiale du groupe britannique Vedanta, fait son entrée dans notre classement à la dixième place, avec plus de 1 milliard de dollars de chiffre d’affaires. Le holding ZCCM Investment, qui représente les intérêts de l’État dans les mines depuis la dissolution de Zambia Consolidated Copper Mines, arrive en 12e position, alors que les chiffres dont nous disposons datent de 2006. Gageons qu’il se classerait à un niveau plus élevé si nous disposions de données actualisées.

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Dans le détail, pourtant, toutes les entreprises minières ne brillent pas. Ainsi, confrontées à la diminution de leurs réserves, les deux leaders maliens de l’or, la Société des mines de Morila et la Société d’exploitation des mines d’or de Sadiola, reculent respectivement de deux et trois places dans notre classement. Sadiola, la plus touchée des filiales maliennes d’AngloGold Ashanti, voit son chiffre d’affaires reculer de 11 % et ses bénéfices de 26 %. Leur maison mère sud-africaine avait envisagé un temps de céder les 40 % qu’elle détient dans la mine de Morila, l’une des plus rentables au monde, mais a finalement fait machine arrière. AngloGold Ashanti n’est pas parvenu à profiter de la progression vertigineuse des cours de l’or depuis quelques années, malgré sa position de leader. Le groupe, dont le chiffre d’affaires en dollars a progressé de 20 % en 2007, a vu dans le même temps se creuser ses pertes : elles ont atteint près de 600 millions de dollars au cours de la même année. Une situation d’autant plus étonnante que ses deux concurrents sud-africains, Gold Fields et Harmony Gold, affichent des résultats positifs. En cause, notamment, sa politique de couverture qui lui permet de s’immuniser contre les variations du cours du métal jaune mais lui a empêché de capter en partie les bénéfices de la hausse. Lâchée en 2007 par son actionnaire de référence, Anglo American, la compagnie s’est depuis engagée à réduire progressivement cette couverture, mais cela devrait lui coûter à court terme.

Les difficultés du secteur aurifère ne sont pas les seuls exemples des problèmes à venir pour les mines africaines. Après les années fastes, les marchés sont nettement baissiers depuis mi-2008. Le cours du platine s’est littéralement effondré en quelques semaines : de plus de 2 000 dollars l’once début juillet, il est passé à moins de 1 000 dollars début octobre. Dans la même période, celui de l’aluminium passait de 3 291 dollars la tonne à près de 2 000 dollars. Le cours de l’or, qui tutoyait les 1 000 dollars l’once mi-juillet 2008, est tombé à 750 dollars début septembre, avant de rebondir au-dessus de 850 dollars en raison de la crise financière, qui fait du métal jaune une valeur refuge. De surcroît, la crise financière et économique qui sévit en Europe et aux États-Unis devrait affecter peu à peu les projets africains, d’une part en retardant les grands projets d’investissement en cours, et d’autre part en freinant le dynamisme des entreprises minières. Déjà, alors qu’une frénésie de fusions-acquisitions s’était emparée du marché depuis quelques années, le groupe anglo-suisse Xstrata a dû renoncer à son offre d’achat de 10 milliards de dollars sur le groupe anglo-sud-africain Lonmin en raison d’une incapacité à réunir les financements nécessaires. Un signe annonciateur de difficultés prochaines.

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