La nécessaire réforme
 de la Bourse d’Abidjan

Publié le 5 décembre 2008 Lecture : 3 minutes.

Depuis sa création à Abidjan en 1996, le succès de la Bourse régionale des valeurs mobilières (BRVM) ne se dément pas, notamment grâce au compartiment obligataire où sont cotées les obligations des sociétés privées, des organismes régionaux et internationaux, ainsi que des États. Fin 2007, la capitalisation totale des obligations atteignait 578 milliards de F CFA (880 millions d’euros), en hausse de 382 % depuis 2000. Mais cette croissance est condamnée à ralentir, sauf à corriger les défauts dont souffre la BRVM.

Il faut, en premier lieu, élargir la base d’investisseurs. Elle a permis de mobiliser 177 milliards de F CFA en 2006, battant de nouveau son propre record. Mais ce montant ne représentait que 3,6 % des crédits à la clientèle dans la zone UEMOA cette année-là. À titre de comparaison, cette proportion a été de 12,6 % au Kenya, grâce à la politique d’expansion de la base des investisseurs qu’y mènent les autorités des marchés de capitaux.

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Deuxième problème, le marché secondaire de la BRVM est insuffisamment liquide. Il s’y échange quelque 4 000 obligations par jour, à rapporter aux 48,3 millions d’obligations cotées. Cette situation, qui s’explique par le comportement buy-and-hold des investisseurs, en grande majorité résidents de la zone UEMOA, et par l’absence d’institutions capables d’intervenir de manière continue pour animer le marché, contribue aussi à freiner l’intérêt des investisseurs internationaux, alors que leur présence permettrait d’améliorer la liquidité du marché.

La BRVM est aussi handicapée par l’insuffisance du système de compensation de l’UEMOA, qui alourdit les coûts de transaction. Bien que ce soit une zone monétaire unique, les délais de règlement étaient de cinq jours à la fin de l’an dernier. Ils sont de trois jours depuis janvier 2008, alors qu’un transfert d’argent d’une capitale africaine à n’importe quelle ville du monde prend moins de cinq minutes.

Dernier obstacle, la réglementation a besoin d’une sérieuse mise à niveau. Des dispenses de garanties et des allègements de taxes, voire des exonérations, favorisent les émetteurs publics et parapublics, qui ont représenté les trois quarts du total émis entre 2003 et 2005. Déjà mis à l’écart, les privés doivent faire garantir la totalité du principal et des intérêts, alors que l’UEMOA ne compte qu’un nombre restreint d’institutions de garanties, quasi inconnues à l’international.

Il devient urgent d’améliorer le fonctionnement du marché obligataire de la BRVM. Pour élargir la base des investisseurs, il faut mener des campagnes plus soutenues d’encouragement à l’épargne. Il est aussi temps de réformer les règles du code d’investissement des compagnies d’assurances en leur permettant de placer plus facilement leurs liquidités sur des titres émis par des entreprises privées.

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Grâce à l’amélioration de ses performances économiques, l’Afrique suscite un intérêt croissant des investisseurs internationaux, mais ils se dirigent en priorité vers des places financières comme Johannesburg, Lagos, Le Caire, Casablanca ou Nairobi, qui ont pris des mesures pour faciliter la libre circulation des capitaux, le libre rapatriement des dividendes, des intérêts et des plus-values, et qui ont conclu des accords de coopération fiscale avec un grand nombre de pays pour éviter une double taxation.

Il est enfin nécessaire de renforcer les ­infrastructures de marché et le cadre ­réglementaire. Les banques commerciales, la Banque centrale et le dépositaire central doivent coordonner leurs efforts pour réduire les délais de paiement et de compensation des titres. La mise en place d’un système de notation de crédit est indispensable pour que les investisseurs internationaux puissent disposer d’un outil d’évaluation objective du rendement et des risques. Douze ans après sa création, la BRVM a atteint les limites de sa jeunesse. Sans réformes pour améliorer son fonctionnement, il est à craindre qu’elle ne devienne qu’une place mineure sur la scène financière internationale.

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