Ouverture 
à pas comptés

Privatisations, sécurisation et informatisation des moyens de paiement, financement des entreprises privées… La mutation du système bancaire est en cours, mais les réformes restent prudentes.

Publié le 18 septembre 2008 Lecture : 4 minutes.

Doucement, mais sûrement. En chantier depuis plus d’une décennie, la modernisation de l’activité bancaire en Algérie commence à se concrétiser. « Le secteur connaît de très belles avancées en matière de paiements et de règlements. Des milliers de clients, des entreprises comme des particuliers, en ressentent les améliorations », insiste Abderrahmane Benkhalfa, le délégué général de l’Association professionnelle des banques et des établissements financiers (Abef).

La dématérialisation du traitement des chèques a ainsi gagné du terrain. L’année dernière, plus de 6 millions de chèques ont été traités ainsi. Depuis mai 2007, les banques du pays sont reliées entre elles grâce à un système de télécompensation. De 26 000 opérations de télécompensation par jour, l’objectif est d’atteindre rapidement les 40 000 opérations. Si la procédure ne concerne encore que les chèques d’un montant inférieur à 2 000 euros, elle s’étendra progressivement aux montants supérieurs avec le déploiement de technologies de transmission des données utilisant les échanges d’images. Et ce n’est que vers 2010, d’après les prévisions de l’Abef, que la télécompensation sera parachevée. Mais déjà, l’Algérie est parvenue à atténuer l’un de ses handicaps majeurs aux yeux des institutions et des investisseurs internationaux, grâce aux technologies de l’information et de la communication (TIC). Le pays s’est effet théoriquement calé sur les standards internationaux de délais de paiements, soit 2 jours pour un virement et 5 jours ouvrables pour un chèque remis à l’encaissement.

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Autre chantier en cours : « Nous sommes au début de la monétique interbancaire, les infrastructures se mettent en place », explique le délégué général de l’Abef. Plus de 1 000 terminaux de paiement sont désormais installés chez les commerçants. Et le pays compte 750 distributeurs automatiques de billets. Aujourd’hui, 200 000 Algériens sont titulaires d’une carte interbancaire, qui autorise les retraits et les paiements. C’est peu. À ceux-ci s’ajoutent plus de 4 millions de porteurs d’une carte bancaire d’Algérie Poste. Parallèlement, le pays ne compte que 1 400 points bancaires – dont 350 pour la Poste – et vit au rythme de l’ouverture de 75 nouvelles agences par an. Le niveau de couverture bancaire reste limité, avec un point bancaire pour 28 000 habitants. « C’est inférieur à la moyenne européenne et méditerranéenne, et les structures sont surchargées. C’est un obstacle, reconnaît Abderrahmane Benkhalfa. D’ici six à sept ans, nous aurons besoin de 1 000 points bancaires supplémentaires. »

Parmi les autres avancées, des progrès sont à noter, après trois ans de mise en œuvre, avec le système électronique de virements interentreprises pour les grands montants (supérieurs à 10 000 euros). Même si le rodage a été lent et difficile, les opérations s’effectuent en quelques heures sous l’œil de la Banque d’Algérie, qui contrôle le système informatique. Cette procédure accélérée devrait bientôt s’étendre à la trésorerie des entreprises.â

L’ensemble de ces réformes qui modernisent et sécurisent les transactions portent donc leurs fruits. Et contribuent à la croissance du marché. Depuis cinq ans, le total des ressources collectées par les établissements bancaires a augmenté de 60 %. Sur cette même période, le taux de progression de crédit additionnel est à deux chiffres (+ 12 % en 2006, + 13 % en 2007). Et l’année 2007 s’est achevée avec un encours de crédit (stock) de 22 milliards d’euros. Alors que le secteur public dominait largement dans les dépôts, ce sont désormais les ménages et les entreprises privées qui représentent 57,4 % du total des dépôts collectés. Par ailleurs, les crédits à moyen et long terme progressent, passant de moins d’un tiers à 48 % actuellement. De même, les impayés sont en baisse, même si les entreprises restent fragiles. Les créances non performantes ont tendance à diminuer, mais elles restent supérieures à « l’orthodoxie bancaire », qui fixe un seuil de 10 %, note l’Abef. Tout n’est donc pas rose. « Sur les questions de financement bancaire et du marché du crédit, le dialogue reste difficile entre les banques et les entreprises, même s’il y a des avancées », relève le délégué général de l’Abef. Une Caisse de garantie des crédits aux PME a vu le jour et il existe un projet de banque de financement de l’investissement.

Malgré tout, la modernisation du secteur bancaire pourrait prendre de la vitesse. Depuis la mi-juin 2008, en effet, Ahmed Ouyahia, qui a montré son intérêt pour ces questions, est à nouveau à la tête du gouvernement. Les atermoiements, les retours en arrière et les gels successifs des programmes de mutation, qui n’ont que trop pénalisé l’Algérie, pourraient laisser la place à une réelle transformation de l’activité bancaire. Mais pour convaincre et rassurer la communauté internationale, le gouvernement algérien doit impérativement relancer le processus de privatisation des banques publiques. 2007 puis 2008 devaient être les années de l’ouverture du capital du Crédit populaire d’Algérie (CPA) et de la Banque du développement local (BDL). De report en report, les autorités se sont discréditées. Reconquérir la confiance de la communauté financière internationale n’est pas le moindre des défis qui attendent le gouvernement, dont le discours prône un retour au patriotisme économique. 

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