Victime de la crise kényane

Publié le 28 novembre 2008 Lecture : 3 minutes.

Il serait temps qu’il passe la main, pensent les diplomates, les bailleurs de fonds et un nombre croissant d’Ougandais. Yoweri Kaguta Museveni, président en exercice de l’Ouganda depuis 1986 – soit vingt-deux ans de règne – est de plus en plus irrité quand on lui suggère de préparer sa succession. Ce n’est quand même pas pour rien qu’il a fait modifier la Constitution en 2005 afin de s’autoriser un troisième mandat à la tête du pays ! D’ailleurs, un quatrième n’est pas à exclure, en 2011, et il considère – il l’a dit à la reine d’Angleterre lors de la réunion des chefs d’État du Commonwealth à Kampala, en novembre 2007 – que l’Ouganda compte parmi les pays « les plus démocratiques au monde ».

Ancien guérillero marxiste converti à l’économie de marché, Museveni a longtemps été un chouchou des Occidentaux, qui voyaient en lui un garant de la paix et de la stabilité dans la région des Grands Lacs. Après les dictatures sanguinaires d’Idi Amin Dada et de Milton Obote, l’Ouganda était sur la voie de la renaissance et de la démocratie. De fait, Museveni a remis l’économie ougandaise sur pied et celle-ci croît désormais d’environ 6 % par an, en moyenne. Après avoir interdit les partis pendant une vingtaine d’années, Museveni leur a de nouveau permis d’exister (un peu) voilà trois ans. Même si le régime souffre de quelques dérives (corruption, népotisme, autoritarisme), son principal artisan peut mettre en avant d’incontestables réussites. D’autant qu’une bonne nouvelle semble se dessiner à l’horizon 2008 : l’Armée de résistance du seigneur (Lord’s Resistance Army, LRA), dirigée par le « prophète » autoproclamé Joseph Kony et autrefois soutenue par le Soudan, n’est plus que l’ombre d’elle-même. Réfugiée en république démocratique du Congo, divisée (Kony aurait même fait exécuter son plus proche lieutenant, Vincent Otti), visée par des mandats d’arrêts internationaux émis par la Cour pénale internationale (CPI), réduite à la portion congrue et mal armée, la LRA ne devrait pas se relever de sitôt, même si les pourparlers entamés en juillet 2006 avec le gouvernement venaient à échouer. La fin de cette longue guerre qui a ravagé le nord du pays représenterait un défi nouveau. Museveni, qui vient du Sud-Ouest, n’a jamais rien fait pour développer le Nord et s’est toujours méfié de sa population, les Acholis – qui le lui rendent bien. La réconciliation passera par le développement de cette région trop longtemps sacrifiée.

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L’économie bénéficie de la croissance des exportations de café (180 millions de dollars en 2006), de thé, de fleurs, de riz, de fruits et légumes et de poissons ainsi que de l’explosion des services (télécoms, tourisme). Mais l’agriculture reste essentiellement vivrière, faute de formation et d’infrastructures adaptées. Le mauvais état des routes, la faible couverture électrique du pays (85 % des Ougandais vivent sans électricité) ou encore les problèmes d’éducation et de santé devraient devenir une priorité du gouvernement. À ce titre, le barrage hydroélectrique en cours de construction sur le Nil ne produira pas d’énergie avant 2011. Quant au pétrole découvert dans le lac Albert, on évoque pour l’instant une production assez faible de 4 000 barils par jour…

La principale menace en ce début d’année 2008 est venue de la situation tendue au Kenya, suite aux élections de décembre 2007. Pays enclavé dépourvu d’accès à la mer, l’Ouganda dépend en effet largement de son voisin pour son approvisionnement, en particulier en pétrole.

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