Majorité présidentielle renouvelée

Publié le 26 novembre 2008 Lecture : 5 minutes.

Année électorale par excellence, 2007 a confirmé l’enracinement du président Abdoulaye Wade, 80 ans, et de sa mouvance dans le paysage politique sénégalais. La coalition Sopi (« changement » en wolof) a remporté 131 des 150 sièges de l’Assemblée nationale lors des législatives du 3 juin 2007. Mais le niveau de participation s’est révélé extrêmement bas, à 34 %. Il faut dire que les principales formations de l’opposition ont boycotté le scrutin pour protester contre les conditions de l’élection du chef de l’État, deux mois auparavant. Le président sortant avait été élu dès le premier tour, le 25 février 2007, avec 55,9 % des suffrages exprimés. L’ancien Premier ministre Idrissa Seck, son principal adversaire longtemps considéré comme un dauphin potentiel, n’avait recueilli que 14,9 % des voix, devant le candidat du Parti socialiste (parti au pouvoir de 1960 à 2000), Ousmane Tanor Dieng, crédité de 13,5 % et dont le recours en annulation a été rejeté par le Conseil constitutionnel.

Si la victoire est nette, les exigences et les attentes des douze millions de Sénégalais n’en sont pas moins nombreuses. Au-delà des critiques de plus en plus fortes quant au népotisme présumé du chef de l’État, la population a subi de plein fouet le renchérissement des cours du pétrole, qui ont atteint des sommets en novembre et décembre derniers. Conjuguée à la contraction du pouvoir d’achat et aux problèmes d’approvisionnement énergétique, cette situation a déclenché de violentes émeutes à Dakar, le 21 novembre 2007. De jeunes vendeurs ambulants ont notamment afflué dans le quartier marchand de Sandaga, dans le centre-ville de la capitale, pour protester contre des mesures prises par le gouvernement afin de les chasser des rues. Une décision sur laquelle les pouvoirs publics sont finalement revenus en permettant à ces vendeurs de s’installer dans deux rues durant les week-ends. Reste que la violence de la manifestation souligne la nervosité extrême d’une majorité de Sénégalais, qui ont de plus en plus de difficultés à joindre les deux bouts. Selon la Banque mondiale, plus d’un habitant sur deux vit avec moins de 2 dollars par jour. Le taux de chômage s’élèverait à plus de 40 % chez les jeunes et le Sénégal ne figure qu’au 156e rang sur 177 dans le classement du Pnud selon l’indice de développement humain. Ce même 21 novembre, la plupart des centrales syndicales sont d’ailleurs descendues dans la rue pour protester contre la vie chère et la hausse des prix des denrées de première nécessité. Quelques semaines plus tard, en janvier, il s’en est fallu de peu qu’une grève générale ne paralyse tout le pays à la suite de l’appel lancé par les mêmes organisations. Fort heureusement, ce mouvement a été suspendu après dix heures de négociations et la signature d’un protocole d’accord avec le pouvoir. Cette situation explique en partie le recul du gouvernement sur les questions salariales, ­celui-ci ayant renoncé à prendre des mesures de diminution des salaires des fonctionnaires.

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Ces difficultés se retrouvent au niveau macroéconomique, avec un taux de croissance tombé à 3,3 % en 2006, contre près de 6 % les années précédentes, et qui dépasse à peine 5 % en 2007. Parallèlement, les soldes budgétaires et extérieurs continuent à se dégrader. Malgré cette situation, le Sénégal conserve la confiance des bailleurs de fonds et de la communauté internationale. Alors qu’une croissance de 6 % est attendue en 2008, un programme économique comprenant d’importantes réformes a été signé avec le Fonds monétaire international (FMI) en juillet 2007 pour la période 2007-2010. Ces chantiers concernent notamment « le renforcement de la transparence et de la gouvernance dans la gestion des finances publiques, l’amélioration de l’environnement des affaires et l’accroissement du rôle du secteur financier ». Les bailleurs de fonds réunis au sein du sixième groupe consultatif pour le Sénégal, les 3 et 4 octobre 2007 à Paris, se sont par ailleurs engagés à fournir 4 milliards de dollars au cours de cette période. Ces fonds seront consacrés à la poursuite de la Stratégie de croissance accélérée (SCA) et au second Document stratégique de réduction de la pauvreté (DSRP II), dont l’objectif vise à ramener le niveau de pauvreté à moins de 30 % de la population d’ici à 2015.

Malgré les contre-performances enregistrées, le pays continue également d’attirer les investissements étrangers. Parmi les grands contrats signés en 2007 figure, outre la construction d’un nouveau port par Dubai Ports World (voir encadré), celui d’Arcelor Mittal. Le géant indien va investir 2,2 milliards de dollars pour développer l’une des plus importantes mines de fer d’Afrique et construire les infrastructures nécessaires à son exploitation. L’objectif étant de créer un pôle majeur pour ses approvisionnements en minerai. Outre l’aménagement d’un nouveau port près de Dakar, ce projet comprend 750 km d’infrastructures ferroviaires. Située près de Faleme, cette mine, dont l’ouverture est prévue en 2011, aura une capacité annuelle de 15 millions à 25 millions de tonnes de minerai.

De nombreux chantiers étaient également attendus dans le cadre du sommet de l’Organisation de la conférence islamique (OCI) que le Sénégal a accueilli en mars (hôtels, routes, immobilier…). Côté industriel, l’un des principaux employeurs du pays, les Industries chimiques du Sénégal (ICS), a connu une amélioration de sa situation suite à la recapitalisation de l’entreprise, le 16 juillet 2007, par le consortium indien Iffco.

L’actualité du marché financier a été dominée par le rachat de la Compagnie bancaire de l’Afrique occidentale (CBAO) par Attijariwafa Bank, le premier groupe bancaire marocain. Ce dernier a acquis 79,15 % de la CBAO, créée en 1853. Une opération qui permet au groupe marocain, déjà présent dans Attijari Bank Sénégal (ex-Banque sénégalo-tunisienne), de se positionner au premier rang des banques de la place. La crise énergétique de ces trois dernières années s’est également améliorée malgré la trésorerie toujours aussi tendue de la Société nationale d’électricité du Sénégal (Sénélec). En octobre 2007, un comité ad hoc a planché sur un nouveau schéma susceptible d’améliorer la productivité de l’entreprise. Il consisterait à démembrer la société en trois pôles distincts respectivement spécialisés dans la production, la distribution et le transport de l’électricité. Les importants retards d’investissements que connaît le secteur ont poussé le gouvernement à prendre des mesures d’urgence, présentées dans la foulée de la réunion du groupe consultatif au cours duquel le ministre de l’Énergie, Samuel Sarr, a évalué les besoins de financements à 2,4 milliards d’euros (1 580 milliards de F CFA). Nouveau partenaire du Sénégal, la Chine a octroyé en juin 2007 un prêt de plus de 36 millions d’euros pour financer cinq nouveaux postes de transformation à Dakar. De quoi réduire les délestages, toujours aussi fréquents sur le réseau.

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Sur le plan intérieur, la situation en Casamance (Sud) demeure incertaine, comme le souligne l’assassinat du président du conseil régional de Ziguinchor et fidèle du chef de l’État, Oumar Lamine Badji, en janvier 2007, suivi de peu par le décès, à l’âge de 78 ans, de l’abbé Augustin Diamacoune Senghor, chef emblématique du mouvement séparatiste casamançais. Malgré la fin officielle de la rébellion après l’accord de paix signé en 2005, des combats opposent régulièrement l’armée sénégalaise aux dissidents du Mouvement des forces démocratiques de Casamance (MFDC), dirigés par Salif Sadio.

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