Portraits : quatre Marocaines dans le vent

Politiciennes aguerries, businesswoman débutante et artiste engagée… Zoom sur quatre battantes, qui ne sont pas toujours là où on les attend.

BENJAMIN-ROGER-2024

Publié le 9 janvier 2013 Lecture : 3 minutes.

Ministre de la Solidarité, de la Femme, de la Famille et du Développement social

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Depuis janvier 2012, l’unique femme du gouvernement de Benkirane prend beaucoup de coups. Du temps où elle était simple députée du Parti de la justice et du développement (PJD, islamiste), elle en rendait beaucoup. Un goût de la castagne acquis au sein de la Jamaa Islamiya, ancêtre du PJD, lorsqu’elle était étudiante à l’université Mohammed-V de Rabat. Élue en 2002, réélue en 2007 et en 2011, Bassima Hakkaoui, 52 ans, s’est distinguée au Parlement par son sérieux. Elle a aussi beaucoup croisé le fer avec les féministes au moment du « plan d’action pour la femme », première tentative de réformer le code de la famille sous le gouvernement d’Abderrahmane Youssoufi, avant de se plier, comme tous ses frères islamistes, à l’arbitrage royal, en 2004. Son foulard très strict et sa djellaba – « à 400 dirhams » (35 euros), persiflent ses détracteurs – lui ont valu bien des railleries le jour de sa nomination au gouvernement. Mais l’enseignante, diplômée en psychologie sociale, s’en moque. Elle cultive sa fibre populaire.

  • Nabila Mounib : gauche dure et gants de velours

Secrétaire générale du Parti socialiste unifié (PSU)

Comme un pied de nez à la présence minimale de la gent féminine au gouvernement, Nabila Mounib a été élue à la tête du Parti socialiste unifié (PSU) en janvier 2012. Une première pour cette formation héritière du mouvement marxiste-léniniste et refuge des déçus de la gauche de gouvernement. Professeur de biologie à l’université Hassan-II de Casablanca et militante du Syndicat national de l’enseignement supérieur (SNESup), Mounib défend les positions radicales du PSU, dont le boycott du référendum constitutionnel, puis celui des législatives, en 2011. En jeans et baskets ou en version glam à la une des magazines féminins, elle s’impose logiquement comme l’égérie de cette « nouvelle gauche » marocaine. Celle qui dit non. Au risque de ne pas être entendue quand elle défend la monarchie parlementaire ou la laïcité.

  • Kenza Bennis : sois belle et lance-toi
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Fondatrice de Fronesis et Blooming Box

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Après avoir touché à la diplomatie lors d’un stage à l’ONU en 2006, titulaire d’un master en finance de l’EMLyon Business School, en France, et d’un MBA de l’université Jiaotong de Shanghai, en Chine – où elle aura le déclic -, Kenza Bennis (27 ans) rumine son idée de start-up tout en travaillant pour une banque d’investissement marocaine. En octobre 2011, elle crée sa société, Fronesis, pour lancer Blooming Box, la première boutique en ligne marocaine spécialisée dans les produits cosmétiques et basée sur les souscriptions. En mars 2012, pour la Journée de la femme, des coffrets beauté sont envoyés en avant-première à 200 VIP. Le concept fait mouche. Les abonnements aux box découverte mensuelles suivent. Pour compléter le dispositif, la boutique en ligne a ouvert en novembre, avec déjà douze marques haut de gamme. Et l’envie, pour Kenza, de faire fleurir d’autres e-projets. Elle sait que la pente de l’entrepreneuriat est ardue, mais pressent que l’autoroute de l’internet est droite et prometteuse.

  • Fatym Layachi, à son corps défendant

Actrice

Elle s’élève contre toutes les entraves à la création. À commencer par l’autocensure. Révélée au cinéma en 2005 dans Marock, de Laïla Marrakchi, une bluette qui fit grand bruit dans le royaume pour avoir été la cible des islamistes de tout poil, Fatym Layachi, 29 ans, semble abonnée aux créations iconoclastes. L’an dernier, dans Un film, une production à petit budget de Mohamed Achaour, elle campe l’épouse d’un réalisateur paumé. Une mise en abyme dont le langage et certaines scènes ont valu au film un retrait des salles quatre jours après sa sortie. Membre du collectif Culture libre, créé en février, et en réaction à « l’art propre » prôné par les islamistes du PJD, la comédienne a posé en mai pour une photo choc, allongée dans une décharge publique de Casablanca. Depuis sa sortie fin novembre dans les salles marocaines, le film de Lahcen Zinoun, Femme écrite, une invitation à explorer la symbolique du corps tatoué en pays amazigh, où elle incarne le premier rôle féminin, vaut encore une fois à Fatym Layachi bien des critiques. Et des milliers de coups de chapeau.

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