Quand l’Union fait la force
Rassemblés sous la bannière de l’Union fait la nation (Un), les adversaires déclarés du chef de l’État sortant ont désigné un candidat unique pour la présidentielle de 2011. L’alliance tiendra-t-elle jusque-là ?
Bénin : Objectif 2011
Lorsqu’on est issu de l’opposition, partir seul à la bataille est assurément plus commode, quoique particulièrement hasardeux. Dans la perspective de l’élection présidentielle de 2011, les battus de 2006 ont donc fort judicieusement décidé, en février, de faire cause commune autour d’une seule bannière: l’Union fait la nation (Un). C’était à vrai dire leur seule chance d’inquiéter le président sortant, Boni Yayi, puisque, il y a quatre ans, leurs scores cumulés au premier tour dépassaient les 55 %.
Du côté de la présidence, on fait mine de minimiser la menace et on fanfaronne sur la relation privilégiée entretenue par le chef de l’État avec la population. Mais, en fait, l’état-major du Palais de la Marina prend cette affaire très au sérieux, surtout depuis le déclenchement du scandale financier des « Madoff béninois » – l’affaire ICC Services et consorts –, aux conséquences politiques imprévisibles.
Les plus lucides évoquent aussi la candidature de plus en plus probable du président de la Banque ouest-africaine de développement, Abdoulaye Bio-Tchané, un deuxième front qui pourrait compliquer la donne. Comités de soutien, sites internet, mise en place d’une Alliance des partis politiques (APP-ABT), installation d’un bureau politique national, déclarations savamment pesées…La machine est lancée.
Adrien Houngbédji, le président du Parti du renouveau démocratique (PRD), est, lui, déjà entré en campagne. « Le Bénin est un pays très politisé. Notre démarche unitaire va transcender tous les clivages et entraîner une dynamique victorieuse », assure celui qui est persuadé que son heure a sonné. Avant d’être adoubé par les barons de l’Un, le 10 avril dernier, le candidat malheureux de 2006 avait coutume de dire qu’il n’avait « plus d’avenir politique, mais un destin ». À 68 ans, il dispose en effet d’une ultime chance d’accéder à la magistrature suprême, la Constitution fixant à 70 ans la limite d’âge pour être candidat. Ce privilège de l’ancienneté a d’ailleurs joué à fond.
Adrien Houngbédji intronisé
Après une rude bataille entre sa formation et la Renaissance du Bénin (RB), de Léhady Soglo, ce dernier, qui va bientôt souffler ses 50 bougies, a fini par céder. Mais avec une bonne dose d’amertume et pas à n’importe quel prix. « Il faut bien comprendre le sacrifice que j’ai consenti en me retirant de la course et prendre en considération le poids électoral de la RB », explique Léhady Soglo, qui attend toujours « le respect des engagements pris ». Allusion à l’échéance de 2016 et au principe de rotation, conclu en avril à l’issue d’une longue nuit de discussions.
« Le candidat Houngbédji doit donner des gages aux militants de la RB, car la victoire finale dépend de nos capacités respectives à convaincre nos électeurs de voter pour un autre leader », explique le fils de l’ancien président, Nicéphore Soglo, qui, dans le cas contraire, redoute une
abstention dans son fief.
Et c’est bien là tout le défi lancé à Houngbédji. Il lui faut tenir l’Un, rassurer la RB, sans fâcher ses propres militants du PRD ni froisser les autres composantes de la coalition, au premier rang desquelles figure le Parti socialdémocrate (PSD), de Bruno Amoussou, qui a atteint la limite d’âge. L’équation est délicate, mais le candidat tchocotchoco (« on va gagner ») dispose, sans nul doute, de l’expérience requise et de l’habileté nécessaire pour surmonter ces rivalités de chefs et dépasser les réflexes communautaires qui structuraient jusqu’alors le rapport des forces dans le sud du pays – d’où sont originaires les dirigeants de l’Un. S’il réussit à braver l’émiettement de ces électeurs du Sud (plus de 60 % du corps électoral), cet ovni politique pourrait bien alors se transformer en machine à gagner.
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