M6 à la manoeuvre
Depuis son accession au trône il y a un peu plus de deux ans, Mohammed VI a été confronté à deux difficultés majeures : le Makhzen, d’une part, et la gestion de sa propre image, d’autre part. Dans les deux domaines, les grandes lignes de sa stratégie semblent, aujourd’hui, mieux dessinées. Contre la lourdeur du Makhzen, cette institution omniprésente et invisible à la fois, le souverain a trouvé une parade qui se résume à un mot : « management » ! En d’autres termes, changer les « kob(*) et les burnous » en « cols blancs ». Le 27 juillet, neuf walis ont été remplacés par des technocrates ayant pour la plupart déjà géré de grandes entreprises. Bref, des hommes censés mettre de l’ordre dans cette institution sur laquelle plane encore l’ombre de Driss Basri. Il faut dire que pendant que ce dernier était aux commandes, les abus les plus invraisemblables ont été commis. À titre d’exemple, il y a cinq ans, à Agadir, à la veille d’une visite de Hassan II, le gouverneur avait fait goudronner les routes et peindre toutes les façades en une nuit. Le mois suivant, la route était déjà fissurée ; quant à la peinture, elle est partie encore plus vite : le travail avait été fait à la hâte dans le seul but de montrer au roi, dont le cortège avait mis quelques minutes à traverser le boulevard, que le amil (gouverneur) travaille ! C’est ce qu’on appelle, au Maroc, « mettre du rouge à lèvres sur de la morve »… Cette anecdote montre la difficulté qu’auront les nouveaux walis à s’imposer dans un système où gestion des coûts et efficacité ne sont pas près de remplacer favoritisme et clientélisme. Le roi l’a bien compris, qui vient de mettre au placard Ahmed Midaoui, son ministre de l’Intérieur, pour lui substituer Driss Jettou, un technocrate, ancien PDG de l’Office chérifien des phosphates (OCP). Après avoir soigné le corps du mammouth, voilà que le roi s’attaque à la tête.
En termes de gestion d’image, M6 sort de son silence. Et accorde des interviews. Après un entretien à Achark Al Awsat, il a répondu aux questions du Figaro montrant qu’il n’est ni désintéressé du pouvoir ni timoré. L’appétit venant en « communicant », il n’est pas exclu que le roi continue dans cette voie. D’autant que M6 possède un atout de poids : son âge. Le peuple et les acteurs économiques les plus actifs sont jeunes, et il est beaucoup plus facile pour eux de s’identifier à M6 qu’au Premier ministre. Le roi ayant fait naître des espoirs et relégué le gouvernement au second plan, il est encore plus attendu sur le terrain de la gestion des inégalités et des prochaines élections. Le nouveau costume de PDG dont il s’est revêtu lui confère une obligation de résultats, certes, mais appelle aussi de l’estime et de la bienveillance.
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