RD Congo : Michel Losembe prêche la bancarisation
Président de l’Association congolaise des banques, le nouveau patron de la Biac attend beaucoup de la mise en place du paiement par virement d’un million de fonctionnaires.
La généralisation du paiement des fonctionnaires par virement bancaire a – évidemment – les faveurs de Michel Losembe, le nouveau patron de la Banque internationale pour l’Afrique au Congo (Biac, troisième établissement de RD Congo). « Avec cette opération, préparée depuis septembre 2011, le gouvernement a pris une décision courageuse pour la transparence de la gestion publique. Et la bancarisation va progresser. Jusqu’à présent, seuls 5 % des Congolais avaient un compte [la moyenne est de 18 % en Afrique subsaharienne, NDLR] », précise celui qui est aussi président de l’Association congolaise des banques (ACB). L’organisme professionnel a signé en novembre 2012 un accord avec le gouvernement à ce sujet. « Jusqu’à présent, 450 000 employés de l’État ont été bancarisés. D’ici à juin 2013, 700 000 fonctionnaires civils et 300 000 militaires devront aller prendre leurs salaires dans les agences bancaires », se félicite-t-il. À terme, 90 millions de dollars (70 millions d’euros) transiteront chaque mois par les banques.
À 49 ans, ce professionnel apprécié par ses pairs, qui a passé dix ans à la tête de la filiale de Citibank à Kinshasa, dirige la Biac depuis janvier dernier. Fils de l’ancien ambassadeur et sénateur Mario Losembe Batwanyele, formé à l’Institut catholique des hautes études commerciales de Bruxelles (Belgique) en compagnie de l’ancien président de l’Assemblée nationale Olivier Kamitatu et de l’ex-vice-président Jean-Pierre Bemba, Michel Losembe connaît bien le milieu politique congolais. Il souligne le climat constructif qui prévaut actuellement entre les autorités et les banques. « Le gouvernement nous donne chaque mois les listes des fonctionnaires pour qui l’ACB doit ouvrir des comptes, et nous les répartissons entre les différents établissements de détail. Bien sûr, il y a des erreurs, car notre administration n’est pas informatisée, mais cela a permis d’éliminer autour de 30 000 fonctionnaires fictifs », indique-t-il. Et d’ajouter : « Nous ne gagnons pas d’argent dans l’affaire : le gouvernement nous paie 3,60 dollars par fonctionnaire, alors qu’en réalité nous estimons nos coûts à 5 à 8 dollars. Mais c’est un pari sur l’avenir. Pour le moment, la plupart des clients retirent leur argent dès le versement du salaire. La culture bancaire mettra du temps à prendre, mais c’est un bon début. »
Je suis plus utile dans le privé. C’est avant tout de là que viendra la croissance.
Pour Michel Losembe, cette opération est une nouvelle étape pour le secteur financier du pays. « Le développement de la banque de détail a commencé très tard mais très fort, avec le microcrédit, au début des années 2000. » Quatre acteurs, appartenant aux grandes familles qui dominent les affaires congolaises depuis l’indépendance, se sont lancés les premiers : Rawbank (famille Rawji), Banque commerciale du Congo (BCDC, famille Forrest), Biac (famille Blattner) et Trust Merchant Bank (famille Levi). Ensemble, ils pèsent aujourd’hui 70 % du marché. « Ces banques ont beaucoup investi, mais bénéficié en retour d’un taux de croissance de 30 % à 40 % d’une année sur l’autre au début, et de 25 % actuellement », indique Losembe.
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Multinationale
Pour un banquier basé à Kinshasa, le choix d’un tel directeur pour la Biac n’est pas le fruit du hasard : « En nommant un homme de Citibank, les actionnaires préparent le terrain pour la revente à une multinationale », croit-il savoir. Une éventualité qui n’est pas démentie par l’intéressé : « Après une telle phase de croissance, il n’est pas impossible que les groupes internationaux s’intéressent enfin aux principales banques locales pour des acquisitions. »
Même si son nom a circulé pour le poste de gouverneur de la Banque centrale, Michel Losembe assure vouloir rester à sa place : « Après m’être consacré à des grands clients internationaux chez Citibank, à la Biac, une banque de détail, je peux davantage oeuvrer au développement économique de mon pays, estime-t-il. Je suis plus utile dans le privé. C’est avant tout de là que viendra la croissance de la RD Congo. »
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