La reconstruction comme moteur

Portée par les pétrodollars, la croissance du pays est la plus élevée au monde : 23,4 % en 2007. Une relance qui attire les investisseurs du monde entier et doit permettre une nécessaire diversification.

Publié le 11 décembre 2008 Lecture : 4 minutes.

A pas de géant
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« La logique du gouvernement est de construire les infrastructures sans lesquelles rien ne peut se faire, explique Michel Gélénine, conseiller économique de la mission économique française à Luanda. Les paiements se faisant en dollars, l’Angola garde une monnaie forte et ne dépense pas ses pétrodollars dans l’économie locale, pour ne pas relancer l’inflation. » De fait, le pays a réussi à stabiliser son économie en ramenant l’inflation de 44 % à 11,8 % entre 2004 et 2007, même si les produits agroalimentaires (dont la plupart sont importés) se sont appréciés de près de 20 % depuis le début de 2008.
Quant à la dette extérieure, « elle est passée de 33 % à 16 % du PIB, un des taux les plus bas du monde. Le temps des crédits gagés sur le pétrole est désormais révolu », se félicite le ministre des Finances angolais, José Pedro de Morais (auquel le magazine britannique The Banker, publié par le Financial Times, a remis fin juillet le trophée du « meilleur ministre africain des Finances » de l’année).
Au sortir de la guerre civile, l’Angola avait en effet eu recours à ce genre de prêt pour financer ses infrastructures. La ligne de crédit de 9 milliards de dollars accordée en 2003 par la Chine (auxquels s’ajoutent les 2,9 milliards du China Fund) a permis jusqu’à présent l’injection d’environ 4,5 milliards de dollars dans l’économie.

Des chantiers par milliers

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Menée par le général Hélder Vieira Dias, dit Kopelipa, homme de confiance du président dos Santos, la reconstruction nationale a pris un bon départ. « En six ans de paix, nous avons construit plus de 2 400 kilomètres de routes, 230 ponts, 223 postes de santé, 30 000 salles de classe, et formé au moins 90 000 professeurs ! Tout cela va nous permettre de relancer l’économie », martèle Rui Pinto de Andrade, le directeur de l’information et de la propagande du MPLA.
L’Angola est en effet un immense chantier. Les projets à l’étude ou en cours de réalisation ne se comptent plus : ports (notamment à Luanda, où le temps d’attente avant déchargement est estimé à quarante jours, mais aussi à Namibe, Cabinda, Lubango, Soyo, Lobito), aéroports (400 millions de dollars sont prévus pour leur réhabilitation dans l’ensemble du pays), lignes ferroviaires (réseaux de Luanda, Malanje, Benguela, Moçamedes)…
De même, l’immobilier public et privé se développe. Favorisant l’émergence d’une classe moyenne, l’État commence à financer des programmes de logement. Lesquels jouxtent des projets plus spéculatifs comme celui, pharaonique, de Kilamba Kiaxi, dans la banlieue de Luanda, où China International Trust and Investment Corporation (Citic) va construire d’ici à 2010 une ville entière de 710 immeubles et 20 000 appartements, pour un investissement de 3,5 milliards de dollars !
La Chine se taille bien sûr une part de lion dans la construction d’infra­structures. Environ 70 % des travaux de reconstruction financés par la Chine sont réalisés par des entreprises chinoises. « Il est très difficile de trouver des places sur le vol Pékin-Shanghai-Luanda. Nous sommes au moins 80 000 dans le pays », commente M. David, restaurateur chinois à Luanda et importateur agroalimentaire. « Entre 80 000 et 100 000 », confirme un conseiller du ministre du Pétrole. Un chiffre qui équivaut à celui des Portugais travaillant en Angola.

Les nouveaux partenaires se bousculent

Le Portugal reste le premier partenaire commercial, dont les exportations vers l’Angola ont atteint 1,9 milliard de dollars en 2007. Les banques portugaises sont très présentes à Luanda à travers des filiales dans lesquelles l’État angolais (voir encadré) prend de plus en plus d’importance. Les groupes portugais de BTP ne sont pas en reste, comme Teixera Duarte, Mota Engil, Soares da Costa… Toutefois, l’ancienne puissance coloniale est aujourd’hui très concurrencée par le Brésil, dont les exportations vers l’Angola ont augmenté de 66,9 % dans les cinq premiers mois de 2008, pour atteindre 606 millions de dollars.
On le voit, l’Angola tente de diversifier au maximum ses partenariats. Sa stratégie de multiplication des joint-ventures entre sociétés nationales et étrangères se traduit par la multiplication des accords de protection (et souvent de promotion) des investissements avec de nombreux pays européens : le Portugal bien sûr (1997), mais aussi le Royaume-Uni (2000), l’Italie (2002), l’Allemagne (2003), l’Espagne et la France (2008). Du coup, les banques européennes se bousculent pour ouvrir des lignes de crédit à l’investissement, qui concernent des centaines de millions de dollars (Caixa Geral de Depositos, Fortis, Société générale, etc.) Un mouvement que la bancarisation de l’économie ne fait que favoriser : le nombre des dépôts a augmenté de 82 % en 2007, et les prêts nationaux, « qui étaient de l’ordre de 2 millions de dollars en 2006, portent désormais sur des montants de 50 millions », explique Gélénine.

Des créneaux porteurs

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Conséquence : une diversification, encore timide mais bien réelle, s’amorce. Outre les richesses minières déjà en exploitation – le diamant et le pétrole (voir p. 72) ont rapporté respectivement 1,3 et 16,1 milliards de dollars aux caisses de l’État en 2007 -, le secteur parapétrolier et les matériaux de construction constituent le fer de lance de cette diversification. Réhabilitation ou construction de raffineries (Luanda, Soyo, Lobito), distribution de carburant (avec, notamment, Sonangalp, le joint-venture entre Sonangol et la société portugaise Galp Energia), développement des cimenteries à Luanda et Lobito, etc. Deux unités produisent déjà près de 2 millions de tonnes par an, sur un besoin estimé à 5 millions de tonnes, et une troisième doit s’établir à Benguela. Et ce n’est pas tout.
L’Angola compte bien favoriser des investissements dans le tourisme, alors que la Coupe d’Afrique des nations (la CAN), organisée par l’Angola en 2010, se rapproche. Une série d’hôtels luxueux sont, par exemple, prévus sur le front de mer de Luanda où sont actuellement réalisés des travaux d’embellissement pour un montant de 110 millions de dollars.
Mais le secteur qui aiguise au premier chef les appétits des investisseurs, c’est celui de l’agroalimentaire. L’Angola se situe, en termes de terres arables sans irrigation (hors Chine), à la quatrième place mondiale avec 92,6 millions d’hectares (derrière le Brésil, l’Inde et la RD Congo).

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