Les habits neufs de Blaise Compaoré
À la tête du pays depuis 1987, aussi médiatisé qu’il reste secret, le chef de l’État burkinabè a acquis, en deux ans, une réputation de faiseur de paix.
Mobilisation contre la vie chère
Il semble bien loin le temps où Blaise Compaoré passait pour le déstabilisateur en chef de l’Afrique de l’Ouest qu’on accusait de fréquenter le Libérien Charles Taylor, d’abriter les opposants de tous poils et d’appuyer les tentatives de putsch contre le Togo d’Eyadéma, la Mauritanie d’Ould Taya et la Côte d’Ivoire de Laurent Gbagbo. Désormais, il jouit d’une tout autre réputation.
Depuis deux ans, le chef de l’État burkinabè, qui est aussi le président en exercice de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), a acquis un statut de vieux sage dans la sous-région. À la faveur de l’accord intertogolais d’août 2006 et, plus encore, de celui intervenu en mars 2007 entre Abidjan et les rebelles ivoiriens de Guillaume Soro, il a montré à la communauté internationale qu’il n’était pas seulement un bon élève des bailleurs de fonds, mais qu’il pouvait aussi jouer un rôle actif dans la résolution des conflits ouest-africains. En plus de garantir la stabilité de son propre pays.
En 2008, l’hôte du palais de Kosyam fait encore mieux. Il obtient l’ultime consécration en étant reconnu comme un homme de paix au-delà du continent. Reconnaissance opportunément entretenue par le chaleureux et très médiatique accueil qu’il a réservé à son ancien frère ennemi, Laurent Gbagbo, en juillet, à Ouagadougou. Et, fin septembre, par sa présence à l’assemblée générale de l’ONU, à New York, où il a présidé une réunion de haut niveau du Conseil de sécurité sur le thème « Médiation et règlement des conflits ».
Auparavant, du 13 au 15 mai, Blaise Compaoré a été invité par Israël à la conférence « Tomorrow » organisée dans le cadre de la célébration du 60e anniversaire de la création de l’État hébreu. Aux côtés d’intervenants aussi prestigieux que Tony Blair, l’ancien Premier ministre britannique, Mikhaïl Gorbatchev, l’homme de la perestroïka, ou encore Viktor Iouchtchenko, l’actuel président ukrainien, il a été associé à une réflexion portant sur les enjeux géostratégiques.
Un mois et demi plus tard, le 1er juillet, la nouvelle dimension prise par la diplomatie burkinabè est confirmée par la nomination de Djibril Bassolé, ministre des Affaires étrangères, au poste de médiateur en chef conjoint de l’Union africaine (UA) et de l’ONU pour le Darfour.
L’onction américaine
Le 14 juillet, le président burkinabè parfait l’ornement de son nouveau blason à Washington, en signant l’accession du Burkina au Millenium Challenge Account (MCA). Ce programme américain destiné à la réduction de la pauvreté lui permet de glaner une enveloppe de 481 millions de dollars. Plus qu’un simple accord de coopération, ce partenariat consenti aux États les plus pauvres, à condition qu’ils manifestent un souci de bonne gouvernance et une volonté de libéraliser leur économie, a valeur d’onction pour Ouagadougou. Même s’il s’agit, aussi, du résultat de quinze mois d’intense lobbying des autorités burkinabè. Le 4 juin 2007, elles ont nommé Tertius Zongo, leur ambassadeur sortant à Washington, au poste de Premier ministre. Et envoyé, pour le remplacer, son prédécesseur à la primature, Ernest Paramanga Yonli… « C’est un rêve qui s’accomplit », commente Cherif Sy, directeur de la publication de l’hebdomadaire burkinabè Bendré.
C’est aussi un revirement stratégique important, à l’heure où les relations entre la Libye et le Burkina, hier très proches, se rafraîchissent. Depuis le sommet de l’UA, à Accra, en juillet 2007, les deux pays ne semblent effectivement plus avoir les mêmes priorités : alors que Tripoli continue de militer pour la création des « États-Unis d’Afrique », Ouaga est plutôt partisan d’un renforcement des unions régionales, au moins dans un premier temps.
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