Maroc : « la maquette » de Hassan Darsi, jardin miniature et oeuvre de salut public
Afin de pousser à la réhabilitation du parc de l’Hermitage, à Casablanca, le marocain Hassan Darsi a réalisé une maquette du jardin. Le Centre Pompidou, à Paris, a aquis cette création pour sa collection.
Fidèle reproduction du parc de l’Hermitage en ruine, « la maquette » est avant tout une œuvre engagée. En reproduisant sur 18 m2 le jardin public de 18 ha de Casablanca, l’artiste marocain Hassan Darsi a mis son talent au service de la sauvegarde d’un lieu historique. Et il a remporté son pari : en 2008, la municipalité a entrepris les travaux nécessaires à la réhabilitation du parc – dont le coût s’élève à 30 millions de dirhams (2,7 millions d’euros) – par le biais d’une convention signée entre le conseil de la ville, la wilaya et la Fondation Mohammed VI pour la protection de l’environnement. Construit entre 1917 et 1927, le parc avait été laissé à l’abandon à la suite des découpages électoraux qui le laissaient à la jonction de plusieurs communes. Le 28 mai dernier, la princesse Lalla Hasna, sœur du roi, a inauguré le jardin presque entièrement rénové.
L’œuvre a donc suscité un vaste débat public. « La maquette est une œuvre, mais c’est d’abord un outil », affirme l’artiste de 50 ans, diplômé de l’École supérieure des arts plastiques et visuels de Mons (Belgique). En février 2002, tandis qu’associations et riverains commençaient à se mobiliser, Hassan Darsi réalise sa maquette, conçue comme un puzzle de quatorze pièces. Avec le collectif d’artistes La Source du lion, qu’il a créé en 1995, il y travaille pendant plus d’un an. « Les matériaux que j’ai utilisés proviennent du parc lui-même, explique-t-il. Cette maquette est un constat très minutieux de la réalité. » Et s’il salue aujourd’hui la réussite des travaux, l’artiste regrette néanmoins que la municipalité n’ait pas pris en compte le plan de réaménagement que son association avait proposé. « Il n’y a pas eu de concertation, déplore-t-il. Le nouveau parc exclut les activités humaines que nous avions suggérées et n’a rénové que les zones de plantation. »
Esthétique et utilité sociale
La maquette, elle, allie esthétique et utilité sociale. « C’est l’œuvre d’un artiste dans l’air de son temps qui évoque la ruine, élément très présent dans l’art contemporain. C’est aussi une œuvre ancrée dans un contexte local », souligne Michel Gauthier, conservateur du Centre Pompidou chargé de la scène marocaine.
C’est à Anvers (Belgique), en 2007, qu’il a découvert le travail de Darsi, exposé au M HKA, le musée d’art contemporain de la ville. « Dès mon premier voyage au Maroc, j’ai voulu rencontrer Hassan », raconte-t-il. Depuis le lancement d’un programme de mondialisation de ses œuvres sous la houlette de Catherine Grenier, le Centre Pompidou cherche à faire entrer dans ses collections des créations non occidentales. Ainsi, le musée a acquis la maquette grâce à un don de Hicham Daoudi, président de la Compagnie marocaine des œuvres et objets d’art (CMOOA) et organisateur de la foire Marrakech Art Fair. L’entrepreneur marocain s’est engagé à financer des œuvres d’art pour le compte du musée sur trois ans, grâce aux bénéfices de ses activités commerciales et des dons de mécènes locaux. Le 25 janvier, une commission d’acquisition s’est réunie pour valider définitivement l’entrée de la maquette dans la collection du Centre Pompidou. Le processus a été lancé il y a un an, après que Michel Gauthier eut présenté devant le comité des conservateurs l’œuvre de Darsi. « La maquette est devenue une nouvelle forme d’expression », explique-t-il. Dans le paysage artistique actuel, ce type de support est encore très peu utilisé. Pour Hicham Daoudi : « Avec cette œuvre, Hassan Darsi a marqué l’Histoire, mais aussi l’art contemporain au Maroc. »
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