Aubry élue, Royal continue

Publié le 30 novembre 2008 Lecture : 2 minutes.

Dans l’histoire du parti socialiste français, jamais un premier secrétaire n’avait entamé son mandat dans pareille situation de faiblesse. Désignée au terme d’un interminable vaudeville, Martine Aubry, qui ne l’a emporté que de 102 voix – sur 134 800 suffrages exprimés -, va devoir gouverner à la fois contre Ségolène Royal et ses partisans, contre la gauche du parti emmenée par Benoît Hamon, et contre les amis de Bertrand Delanoë. Autrement dit, les trois quarts du parti.
Fille de Jacques Delors, cette énarque de 58 ans, ancienne ministre d’Édith Cresson puis de Lionel Jospin, aujourd’hui maire et présidente de la communauté urbaine de Lille, n’aura pas trop de son expérience pour parvenir à s’imposer.
Car la candidate battue est déjà en embuscade. « 2012 c’est bientôt, 2012 c’est demain ! » a lancé Royal, radieuse, dans une vidéo diffusée sur son site Désirs d’avenir, dès le lendemain du scrutin. Sous-entendu, je suis candidate et ne me priverai pas de le faire savoir. Et pour ceux qui, au PS, croiraient en avoir terminé avec elle, la présidente de la région Poitou-Charentes a prévenu : « Vous me connaissez, je ne reste jamais les bras ballants. » Bref, la victoire d’Aubry semble n’être à ses yeux qu’une péripétie déjà oubliée. À se demander pourquoi elle a mis tant d’acharnement à briguer le poste de premier secrétaire.
En face, la majorité hétéroclite qui a porté Martine Aubry au pouvoir n’est cimentée que par une commune détestation de Ségolène Royal. Celle-ci écartée, les divisions vont prospérer. Au cours des derniers mois, Benoît Hamon n’a cessé de dénoncer l’appareil du parti, coupable à ses yeux d’immobilisme et de renoncement aux valeurs de la gauche. Appareil du parti auquel, justement, appartenait Aubry, membre du bureau national. Il n’est d’ailleurs pas sûr que les partisans d’Hamon, à l’heure du choix entre les deux femmes, se soient tous rangés derrière la maire de Lille.
Du côté de Delanoë, on attribue la défaite à la nouvelle première secrétaire. En présentant une motion, elle aurait affaibli le maire de Paris, l’empêchant de passer devant Ségolène et de s’imposer comme le rassembleur du congrès. La rancune ne s’effacera pas du jour au lendemain.
La principale qualité de Martine Aubry est surtout de ne pouvoir prétendre être candidate à l’Élysée, en 2012. Question d’image et d’envergure politique. Elle ne gêne ni Delanoë, ni François Hollande, ni Dominique Strauss-Kahn dans l’hypothèse où celui-ci reviendrait en jeu après son mandat à la tête du FMI.
Au fond, les postulants à la magistrature suprême lui demandent d’expédier les affaires courantes jusqu’à la prochaine échéance électorale et de maintenir – autant que faire se peut – le parti en état de marche. Les militants qui espéraient que le Congrès de Reims lancerait la rénovation du PS en seront pour leurs frais. Il n’est pas certain qu’ils soient tous encore là en 2012

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