L’Afrique fait son cinéma à Apt

La petite ville du sud de la France rend hommage au septième art du continent. Une programmation éclectique pour un public avide de découvertes.

Publié le 30 octobre 2005 Lecture : 3 minutes.

Le Festival des cinémas d’Afrique d’Apt s’enracine et se développe : six jours, vingt-trois films programmés, avec un accent particulier sur le cinéma sénégalais pour sa troisième édition qui se déroule du 4 au 9 novembre. Apt, petite ville du sud de la France, a pu déjà se familiariser avec les arts africains, grâce aux expositions de peinture et aux résidences d’artistes organisées par la fondation Jean-Paul-Blachère. Le festival est porté par un groupe d’amateurs passionnés réunis autour de l’un de ses cofondateurs, Dominique Wallon, qui poursuit ainsi son oeuvre de promotion du cinéma africain commencée il y a près de vingt ans.
Les deux amours de Wallon, ce sont les arts et l’Afrique. Dans son salon, des toiles d’une amie peintre congolaise ; dans sa bibliothèque, la collection quasi complète des catalogues du musée Dapper de Paris. Mais, surtout, une véritable cinémathèque des productions africaines. Car, de tous les arts, c’est au septième, que Dominique Wallon a voué une grande partie de sa vie professionnelle.
Et c’est par le cinéma qu’il a découvert l’Afrique noire après avoir tissé des liens forts avec l’Afrique du Nord pendant la guerre d’indépendance de l’Algérie. En 1991, alors qu’il est directeur du Centre national du cinéma (CNC), il débarque à Ouagadougou, au Fespaco, avec, dans son sac, un avant-projet d’accord de partenariat cinématographique franco-burkinabè. « J’ai débarqué à Ouagadougou sans connaître personne. La ministre de la Culture m’a reçu et, en moins d’une semaine, l’accord était ficelé », raconte-t-il. Un accord qui consacre une rupture dans les relations cinématographiques franco-africaines et qui servira de modèle à beaucoup d’autres.
« Nous voulions sortir de ce système d’aides au coup par coup que le ministère de la Coopération attribue aux réalisateurs africains pour structurer leurs industries cinématographiques nationales. » Cette évolution rendait aussi possible la réalisation de coproductions, dans une logique de partenariat et non plus d’assistance.
Dès lors, les choses s’accélèrent. Wallon tisse des liens professionnels et amicaux intenses avec tous les grands noms du cinéma africain. Il veut les faire connaître au public français et choisit pour cela la grande porte : il les fait inviter au Festival de Cannes. En 1991, le film Tilaï, du Burkinabè Idrissa Ouédraogo, y obtient le Grand Prix du jury. L’année suivante, six films africains sont présentés, dont trois en sélection officielle. Après Sembène Ousmane et Souleymane Cissé, le public français découvre ainsi d’autres noms du cinéma africain dont la diffusion des films en France, mais aussi en Afrique, sera bientôt soutenue par l’association Écrans Nord-Sud, que crée Wallon en 1997, après son départ du CNC.
Dix ans après, loin des fastes de Cannes, Wallon s’appuie sur des structures associatives locales beaucoup plus modestes pour faire découvrir le cinéma africain aux gens de la région d’Apt où il s’est retiré pour sa retraite. Et d’abord aux enfants, puisque des accords ont été passés avec les écoles des environs pour organiser des séances de projection devant les élèves. « C’est un grand succès », affirme Wallon, qui y voit une bonne manière de faire découvrir aux jeunes un continent africain trop souvent réduit aux quelques clichés que véhiculent les médias occidentaux.
L’an dernier, à Apt, le Sénégalais Moussa Touré projette devant une classe d’enfants en difficulté scolaire et sociale un film sur les enfants de la rue de Brazzaville. Le choc, immédiat, est tellement intense que les jeunes élèves français acceptent de venir raconter leurs difficultés et leurs problèmes devant la caméra du cinéaste sénégalais. Ce sera Nanga Def ? (« Comment vas-tu ? », en wolof), le premier long-métrage produit par l’équipe du festival. Pour donner le change, Moussa Touré a tourné cet été Naawari ? (« Comment vas-tu ? », en soninké) avec les enfants d’une classe de CM2 de Bakel, ville sénégalaise jumelée avec Apt. Les deux films seront projetés cette année dans la vieille cité provençale. « Le festival éveille la curiosité, fait apprécier les différences de cultures. Le public jeune y participe avec beaucoup de naturel et de plaisir », se réjouit Wallon.

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