Avenir sombre pour les salles obscures ?

Publié le 30 octobre 2005 Lecture : 2 minutes.

Entre le 1er janvier et le 30 septembre 2005, les guichets des salles de cinéma ont vendu en France 124 millions de billets d’entrée. Un chiffre apparemment astronomique, qui cache en fait un sérieux recul : le nombre des spectateurs attirés par le grand écran a diminué de 13,4 % par rapport à la même période en 2004. Seule consolation pour les cinéastes locaux : la part du cinéma français dans le total a augmenté, de 34,7 % à 37,4 %, au détriment du cinéma hollywoodien. Cette désaffection pour les salles obscures est en fait quasi générale dans le monde. Dans la grande patrie du cinéma, aux États-Unis, les recettes cumulées des films en 2005 avaient atteint à la mi-octobre, avec un total de 6,72 milliards de dollars, un score inférieur de 6 % par rapport à 2004. Et cette baisse au box-office n’a fait que s’accentuer au fil des mois, tout comme en France d’ailleurs.
Ces mauvaises nouvelles ont suscité de nombreux commentaires dans la presse des deux côtés de l’Atlantique, certains évoquant même le risque d’une disparition progressive des salles sur toute la planète. Comme le remarquait Martin Scorsese dans une adresse aux cinéphiles venus inaugurer fin septembre la nouvelle cinémathèque française à Paris-Bercy, « la projection en salles n’est plus qu’un événement mineur dans la vie d’un film ». La sentence est peut-être un peu exagérée, pour l’instant du moins, au niveau mondial, mais elle s’applique parfaitement aux grands studios hollywoodiens : on estime qu’aujourd’hui la grande majorité des revenus générés par les films aux États-Unis (plus de 80 %) provient des ventes des droits de diffusion aux chaînes de télévision et du commerce des DVD.
Parmi les raisons de cet essor des nouveaux modes de diffusion du septième art au détriment des salles, le piratage joue un rôle majeur. Pourquoi payer cher un ticket de cinéma individuel alors qu’on peut trouver pour une somme dérisoire presque tous les films à succès récents sur des DVD au marché parallèle ? Un phénomène mondial, et non sans effets. En Afrique noire francophone, remarquait récemment Olivier Barlet dans un article des Cahiers du cinéma, il ne reste plus à ce jour qu’une vingtaine de salles plus ou moins dignes de ce nom. Et ce n’est guère mieux au Maghreb, où le nombre de salles est certes encore très supérieur mais où le déclin du parc, notamment au Maroc, est rapide et spectaculaire.
Paradoxalement, le danger de voir disparaître les salles est sans doute plus vif et plus immédiat dans les pays qui ne disposent pas d’une cinématographie nationale importante que dans les autres. Aux États-Unis ou en France, mais aussi dans les pays du Sud où l’on a réussi à préserver une industrie cinématographique, nul n’ignore que le lancement d’un film, pour l’essentiel, n’est réussi que s’il accompagne une sortie en salles, qui fera toujours plus « événement » que la mise dans le commerce d’un DVD ou la diffusion – a fortiori la rediffusion – d’un long-métrage sur le petit écran.

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