Abderrazak Cheraït, édile érudit

Maire de Tozeur depuis 1995, il a fait de sa ville une destination très prisée.

Publié le 30 septembre 2007 Lecture : 2 minutes.

Il faut le voir déambuler dans les rues de sa ville, vêtu sans complexe d’un vieux burnous, une chéchia sur la tête. Il faut l’observer sur la tribune officielle du Festival des oasis, en costume-cravate. Il faut le voir inspecter les trésors de ses musées et poursuivre sa route, plus loin, en direction des quartiers populaires, comme le faisait jadis le calife Haroun al-Rachid, l’oreille tendue vers les doléances de ses ouailles. Et puis, le soir, recevoir à sa table le roi d’Espagne, un conseiller de l’Élysée ou un Prix Nobel. Avec cette même disponibilité et ce sens de l’écoute qui l’ont fait élire deux fois maire de Tozeur. Avec cette érudition et cet humour qui poussent les amoureux de l’art à chercher sa compagnie.

Abderrazak Cheraït est né en 1937, loin des confins du Sahara. À Tunis, plus exactement. Résistant de la première heure, créateur de la première cellule destourienne en 1954, il fut aussi un militant de gauche. Après un passage à l’École des hautes études de Tunis (aujourd’hui disparue), il se lance dans l’industrie électrique, crée, en 1976, la Société méditerranéenne des travaux électromécaniques et fonde la Banque du Sud. Élu maire de Tozeur en 1995, il n’a de cesse de faire de cette oasis un pôle touristique et culturel de premier plan. Il y implante une infrastructure hôtelière, lance des plans d’aménagements urbains, bataille pour conserver le patrimoine architectural de la ville dont il fait le cur battant du tourisme saharien.

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Mais cet élu modèle est aussi un esthète, un érudit et un essayiste à ses heures (auteur, entre autres, d’un livre sur le poète Aboulkacem Chebbi). Il entend mettre son savoir et son expérience au profit de la mémoire collective et mise sur le patrimoine historique et imaginaire de la région. Alors qu’il n’est pas encore maire, il n’hésite pas à investir ses propres deniers pour organiser des spectacles « son et lumière » qui retracent les grandes époques et figures légendaires de Tunisie. En 1990, il construit le premier complexe de parcs à thème, comprenant un musée et un hôtel de luxe qui porte son nom : Dar-Cheraït. En 1994, il offre à la palmeraie la « Médina des mille et une nuits » et, deux ans plus tard, « Dar-Zaman », retraçant toute l’histoire du pays. Le promoteur privé a gagné son pari. Alors qu’en 1990 un journal de la place titrait « Tozeur, c’est l’horreur », dix-sept ans et deux mandats plus tard, cette ville du Sud est devenue un exemple de la réussite du tourisme saharien en particulier, du tourisme culturel en général.
Sa dernière uvre, « Chak Wak » (du nom d’une île fantastique des Mille et Une Nuits), est un parc qui retrace, à travers des sculptures, la création de l’univers. Cheraït, fou ou mégalo ? Rêveur, tout simplement. Un éternel enfant, un mécène dans la pure tradition arabe, une espèce en voie de disparition.

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