Compaoré médiateur

Publié le 30 juillet 2006 Lecture : 3 minutes.

Après plusieurs mois de surenchères, de propositions avortées et de pourparlers serrés, les acteurs du Dialogue politique intertogolais ont fini par trouver, le 25 juillet, un « facilitateur » en la personne de Blaise Compaoré. Après une première médiation qui, en 1992-1993, déboucha sur la conclusion des accords Ouagadougou I, II et III, le chef de l’État burkinabè s’est dit « honoré » d’être à nouveau sollicité pour tenter de dénouer la crise togolaise. Le 26 juillet, il a assuré de sa disponibilité le « directoire du Dialogue », qu’il recevait à Ouagadougou.
Les premières tractations remontent au lendemain de l’élection controversée de Faure Gnassingbé, le 24 avril 2005. Moins de deux mois plus tard, Alpha Oumar Konaré, le président de la Commission de l’Union africaine (UA), avance le nom de Kenneth Kaunda. L’ancien président zambien est placé à la tête d’un groupe constitué par le Conseil de paix et de sécurité de l’UA afin de faciliter le dialogue politique au Togo. Début juillet 2005, lors du sommet de Syrte, Konaré en parle avec Faure Gnassingbé. Mécontent de ne pas avoir été préalablement consulté, celui-ci exprime courtoisement des réserves. La piste Kaunda s’éloigne, en dépit de l’intense lobbying de l’Union des forces du changement (UFC), le principal parti d’opposition, que dirige Gilchrist Olympio.
En novembre 2005, Kofi Annan, le secrétaire général des Nations unies, avance le nom de Lakhdar Brahimi, l’ancien ministre algérien des Affaires étrangères, mais il faudra attendre près de deux mois pour que l’hypothèse soit vraiment étudiée. Hésitant, le pouvoir togolais propose que Moustapha Niasse, l’ancien Premier ministre sénégalais, soit adjoint à Brahimi, en qualité d’observateur. Refus de l’opposition et nouveau blocage.
En visite à Ouagadougou au mois de février dernier, Edem Kodjo, le Premier ministre togolais, sollicite Compaoré. Celui-ci lui donne son accord de principe, puis, le 20 mars, le confirme à Faure Gnassingbé, à qui il rend visite dans son fief de Kara, dans le nord du pays. Pour vaincre les réticences des chefs de l’opposition, qui le jugent trop proche du pouvoir togolais, Compaoré les reçoit tour à tour chez lui. D’abord Olympio, puis Léopold Gnininvi, de la Convention démocratique des peuples africains (CDPA), puis Yawovi Agboyibo, du Comité d’action pour le renouveau (CAR).
S’il n’arrive pas à lever toutes les préventions, le Burkinabè est néanmoins associé à la première phase du Dialogue, qui s’ouvre le 21 avril. Djibrill Bassolé, son ministre de la Sécurité, et Sadio Lamine Sow, son conseiller personnel, suivent de bout en bout les travaux, en qualité d’observateurs. Le 6 juillet, un « accord politique de base » est conclu, que deux des neuf partis, l’UFC et la CDPA, refusent de parapher. Les « points de discorde » concernent notamment les conditions d’éligibilité, la composition de la commission électorale et le mode de scrutin. Tout cela ramène sur le tapis la nécessité de trouver un médiateur. Le 19 juillet, le directoire du Dialogue demande aux partis de lui proposer des noms.
Pour ne pas susciter de nouvelles contestations, le Rassemblement du peuple togolais (RPT), le parti au pouvoir, s’abstient de toute recommandation. Pour sa part, l’UFC suggère les noms de Brahimi, de l’ancien président finlandais Martti Ahtisaari, d’Abdou Diouf, le secrétaire général de l’Organisation internationale de la Francophonie, et de Carl Bildt, l’ancien Premier ministre suédois. La CDPA propose six anciens présidents africains classés par ordre de préférence : Konaré, Joaquim Chissano, Nicéphore Soglo, Diouf, Jerry Rawlings et Kaunda. Le nom de Compaoré n’est mentionné que subsidiairement.
Son hostilité à ce dernier, la personnalité pressentie qui connaît le mieux la crise togolaise, isole l’UFC, qui, le 25 juillet, finit par se rallier, pour ne pas provoquer un nouveau blocage qui risquerait d’exaspérer certains partenaires extérieurs comme l’Union européenne. Place donc à Compaoré ! À en croire l’un de ses proches, le « facilitateur » réfléchit déjà au modus operandi des futures discussions.

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