De bonnes raisons d’investir

Delphi, Valeo, Leonisch, Pirelli… Grâce aux équipementiers étrangers, le secteur emploie plus de 30 000 personnes.

Publié le 30 avril 2006 Lecture : 3 minutes.

Depuis 1988, les voitures ne sont plus montées en Tunisie. L’essentiel de l’industrie automobile s’est recentré sur les composants et pièces détachées. Ce secteur a connu un fort développement sur les dix dernières années, grâce notamment à l’implantation de firmes multinationales dans le cadre de la mondialisation de leur production et de leurs approvisionnements. Parmi les équipementiers étrangers opérant dans le pays figure le numéro un mondial, l’américain Delphi, qui possède environ 35 % du capital de Cofat (3 000 salariés). Le français Valeo, premier fournisseur de câbles aux constructeurs européens, est aussi le numéro un de la spécialité en Tunisie. Il emploie 5 000 salariés dans deux usines près de Bizerte. Citons également l’allemand Leonische, qui emploie 3 500 salariés à Sousse, l’italien Pirelli, ou encore Lear Automative, Defontaine, Autoliv, Gruner AG, Kashcke EG Cette politique de partenariat avec les équipementiers étrangers a permis, par exemple, au groupe Chakira, leader local du câblage, de se développer à l’international, en créant des unités en Égypte, au Portugal, au Maroc et, bientôt, en Roumanie.
Le secteur compte aujourd’hui 175 entreprises de plus de 10 personnes employant 32 000 salariés, contre, respectivement, 124 et 16 000, cinq ans plus tôt. Au fil des ans, la Tunisie a acquis des compétences, principalement dans le domaine des faisceaux de câbles (pour l’allumage ou le circuit électrique des véhicules). Cette branche représente désormais plus de 60 % de la production sectorielle et 80 % de ses exportations. D’autres branches, telles que l’électronique, la forge-fonderie, l’usinage ou la transformation des plastiques et du caoutchouc, ont bénéficié d’un effet d’entraînement.
Le secteur dans son ensemble a réalisé un chiffre d’affaires global de 1,2 milliard de dinars (735 millions d’euros) en 2003, contre 0,5 milliard cinq ans auparavant, enregistrant ainsi une croissance annuelle moyenne de 18 %. Parallèlement, la taille moyenne des entreprises est passée de 129 à 187 salariés, les investissements pour la création de nouvelles unités et l’extension d’anciennes se sont élevés à 1,27 million de dinars, et la balance commerciale a souvent été excédentaire (130 % en 2003). Les exportations du secteur, en hausse de 19 % par an, sont passées de 0,4 milliard de dinars en 1999 à 0,8 milliard en 2003. Les principaux pays destinataires sont les partenaires traditionnels de la Tunisie : la France (40 %), l’Allemagne (27 %) et l’Italie (12 %). Nettement moins élevées, les importations sont passées, quant à elles, de 0,45 milliard de dinars en 1999 à 0,62 milliard en 2003.
Selon une étude réalisée pour le compte de l’Agence tunisienne de la promotion des investissements, « la compétitivité internationale de la Tunisie est prouvée dans certains créneaux des composants automobiles, comme les faisceaux de câbles, qui ont la plus forte rentabilité. Ils sont suivis par les composants en caoutchouc, les filtres et les amortisseurs ».
Une étude comparative entre la Tunisie et trois autres pays – le Maroc et la Turquie, considérés comme concurrents de niveau comparable, et l’Allemagne, pays industrialisé – portant sur un positionnement par produit (batteries, échappement, filtres, pneumatiques, ressorts à lames) et centrée sur sept critères spécifiques (qualité, prix, service, image de marque, technologie, capacité de production et part de marché) a montré que la capacité de production des entreprises tunisiennes est insuffisante pour aborder l’international. Et même si les prix sont intéressants, l’image de marque reste à améliorer au niveau de la qualité, de la technologie et du service.
Pour mesurer l’impact sur le secteur du démantèlement tarifaire – inscrit dans l’accord prévoyant la création d’une zone de libre-échange avec l’Union européenne en 2008 -, des simulations par les prix ont été réalisées pour certains composants. Il en ressort que certains resteront compétitifs après démantèlement tarifaire complet (batteries et amortisseurs). D’autres ne le seront plus (ressorts hélicoïdaux). Une troisième catégorie est composée de produits qui ne sont pas compétitifs même avant le démantèlement (soupapes). En fait, les études révèlent que la Tunisie dispose d’atouts importants (salaires faibles, avantages fiscaux, encadrement et main-d’uvre qualifiée), mais souffre de facteurs défavorables : coûts de transport élevés et perte de productivité due aux horaires du ramadan et à la séance unique en été.
Le pays, qui a su profiter du mouvement de délocalisation de certaines activités liées à l’industrie mondiale, pour attirer davantage d’investissements, reste finalement un site relativement marginal pour les grands équipementiers internationaux. La faute en incombe au tissu industriel local, pas assez développé. Commentaire d’un industriel de la place : « Pour accroître les investissements étrangers et mieux profiter des relocalisations dans le secteur des composants automobiles, la Tunisie doit faire encore un effort en matière de fiscalité, mais aussi de valeur ajoutée et de centre de recherche. Elle doit aussi disposer d’une logistique impeccable, indispensable dans une industrie comme l’automobile fonctionnant en flux tendu. »

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