L’homme qui n’en savait pas assez

Publié le 30 janvier 2005 Lecture : 2 minutes.

Le général Amer Hammoudi al-Saadi l’avait dit et répété : non, son pays ne possédait plus, et depuis longtemps, d’armes de destruction massive (ADM). Non, il ne dissimulait rien aux inspecteurs en désarmement de Hans Blix, car il n’y avait rien à dissimuler. Ce scientifique, devenu conseiller de Saddam, était responsable du programme irakien d’armement. Il a été l’un des premiers dignitaires du régime déchu à se rendre aux forces américaines, le 12 avril 2003, trois jours après leur entrée dans Bagdad. Convaincu de n’avoir rien à se reprocher, il avait pris peur en découvrant son nom sur la liste des 55 responsables recherchés morts ou vifs. Il était « le sept de carreau » dans le sinistre jeu de cartes à l’effigie des dignitaires baasistes distribué aux GI’s. Au moment de sa reddition, filmée par les caméras de la télévision allemande ZDF, les Américains, triomphants, ont parlé d’une grosse prise. Saadi, expliquaient-ils, « sait le matériel délictueux est entreposé ». Ils allaient le faire parler…
Aujourd’hui, tout le monde en convient, même George W. Bush et Tony Blair : l’Irak ne possédait plus d’armes de destruction massive depuis 1995. Saadi n’avait pas menti. Mais il est toujours détenu à la prison de l’aéroport, en compagnie de quelques autres dignitaires du régime déchu, dont Tarek Aziz, l’ex-ministre des Affaires étrangères. Sa femme, Helma, une Allemande installée depuis trente ans en Irak, l’a vu pour la dernière fois en février 2004. « Mon mari n’a jamais fait de politique et a toujours servi loyalement son pays, a-t-elle expliqué aux journalistes de la télévision allemande. Il n’était pas encarté au Baas, et sa dernière rencontre avec Saddam remontait à 1995. Du reste, de quoi est-il coupable au juste, sinon d’avoir dit la vérité ? Aucun acte d’accusation ne nous a jamais été communiqué. »
Helma, pour sensibiliser l’opinion internationale à la cause de son mari, vient de sortir une autobiographie, rédigée dans la langue de Goethe : Une vie entre Habsbourg et Bagdad. Alertée, l’organisation Human Rights Watch a demandé des éclaircissements à l’armée américaine. Réponse laconique du lieutenant Barry Johnson, chargé de la communication au sein du milieu carcéral : « Notre règle est de ne donner aucun renseignement sur les cas individuels. » On s’en serait douté : circulez, il n’y a rien à voir !

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