Une culture sérieusement menacée

Publié le 29 mai 2005 Lecture : 2 minutes.

Fin 2004, l’Organisation mondiale du commerce (OMC) a condamné les pratiques commerciales des États-Unis, jugeant illégales les subventions que l’administration américaine accorde à ses producteurs de coton. Pour les Brésiliens, auteurs de la plainte, c’est une victoire. Ils attendent désormais les compensations que Washington sera contraint, tôt ou tard, de leur verser. Les Africains, eux, sont dans une impasse. Ils ne se sont pas joints officiellement à la procédure engagée par Brasilia. Et s’ils devaient aussi bénéficier de l’arrêt des subventions américaines, le temps que cette mesure soit effective, leurs filières cotonnières seront peut-être ruinées. En marge du sommet ACP-UE, qui s’est tenu à Bamako le 19 avril dernier, Peter Mandelson, le commissaire européen au Commerce, est convenu que le temps ne jouait pas en faveur des filières africaines. Il a ainsi promis que l’UE renforcera son appui au développement du secteur cotonnier en Afrique et que, dorénavant, « l’Europe va faire pression pour une action multilatérale afin de construire un système réglementé plus juste, qui permette plus d’équité sur le marché du coton ». Reste à concrétiser ces bonnes intentions.
Car, au Mali, l’heure est grave. Le coton fait vivre 3 millions de personnes, soit près d’un tiers de la population. C’est la principale culture de rente. La CMDT, société mixte détenue à 60 % par l’État et à 40 % par l’entreprise française Dagris, dispose d’un quasi-monopole sur l’ensemble de la filière. En outre, elle a longtemps assuré nombre de missions de service public dans les zones productrices. Jusqu’au coup d’envoi de la libéralisation, en 2001. Depuis, les planteurs se sont appauvris, tandis que la privatisation patine. Sans cesse reportée, elle devrait aboutir en 2008. Mais la baisse des cours, couplée à une parité euro/dollar très défavorable à la zone CFA, a achevé de creuser le déficit de la CMDT, estimé à 50 milliards de F CFA en 2004. La filière malienne, très compétitive il y a quelques années, est en crise. Ses coûts de production sont aujourd’hui nettement supérieurs à ceux du Brésil.
Face aux pressions des bailleurs de fonds qui jugeaient le prix d’achat du coton au producteur trop élevé, le Mali a décidé, début 2005, de revoir le mécanisme de fixation des prix. Le 5 mai, le tarif de la campagne 2005-2006 a été annoncé : 160 F CFA le kilo de coton-graine. C’est 50 F CFA de moins qu’en 2004. Mais le dispositif prévoit une possible réévaluation en août prochain. Reste à savoir quel sera l’impact de cette décision. Si le gouvernement se dit confiant quant à la stabilisation de la production aux alentours des 600 000 tonnes, certaines voix se font plus sceptiques. « On court à la catastrophe, estiment certains. À ce prix-là, la culture n’est plus rentable. » Et beaucoup de planteurs risquent d’être évincés. Reste à savoir comment les aider à se reconvertir.

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