Pohamba, clone de Nujoma…

Le nouveau président semble tout désigné pour prendre le relais du « Père de la nation ».

Publié le 28 novembre 2004 Lecture : 3 minutes.

Tout s’est passé comme prévu, les 15 et 16 novembre, pour Hifikepunye Pohamba, le candidat de la Swapo (Organisation du peuple du Sud-Ouest africain), parti dirigé par le président sortant, Sam Nujoma. Élu à la présidence de la République avec 76,4 % des voix, il bénéficie en outre de 55 des 72 sièges du Parlement. Le vieil ami de Nujoma – il a 69 ans, seulement six ans de moins que le Père de la nation – aura donc une grande marge de manoeuvre. À Windhoek, l’homme de la rue sourit en évoquant le nouveau chef de l’État, tant sa ressemblance avec « le Vieux » est frappante : même stature, même barbe grisonnante, mêmes grosses lunettes, même point de vue sur la conduite des affaires, façonné par les années de lutte pour l’indépendance obtenue en 1990.
Mais à l’exubérance joviale de son prédécesseur, Pohamba oppose modestie et discrétion. Il n’a jamais manifesté la moindre ambition présidentielle jusqu’au congrès de la Swapo, le 30 mai 2004. Nujoma, qui dirige le parti jusqu’en 2007, a dû peser de tout son poids pour que son « poulain » l’emporte.
Pohamba va gouverner le pays, mais l’ombre de son puissant mentor s’étend encore sur lui. Pourtant, l’homme ne manque pas de savoir-faire politique, il l’a maintes fois prouvé, notamment dans ses précédentes fonctions de ministre des Terres. Il a su conduire la délicate réforme agraire, la majeure partie des terres fertiles étant, comme dans la plupart des pays d’Afrique australe, aux mains des fermiers blancs. « Parler, parler, parler, voilà ce à quoi nous croyons », a-t-il dit pour commenter son action passée et future.
On retrouve là sa manière, diplomatique, de mener la lutte. Il a conduit toute sa vie de cette façon, composant avec les hommes et les événements. Né le 18 août 1935 à Okanghudi, dans le centre-nord du pays, Hifikepunye Pohamba a commencé ses études, comme son camarade Nujoma, dans une mission anglicane. De 1956 à 1960, il est employé de bureau dans une mine de cuivre et, à ce titre, participe à la fondation de la Swapo, dont les premières activités sont syndicales. Son ciel s’assombrit lorsqu’il est arrêté par des chefs traditionnels opposés à l’action du nouveau parti, enchaîné pendant plusieurs jours et condamné par un tribunal coutumier à être flagellé en public pour « activisme politique ». Trahi par les siens, il part en exil pour revenir clandestinement l’année suivante. De nouveau arrêté et emprisonné, il s’en sort avec une assignation à résidence avant de repartir jusqu’en 1966. Élu au comité central de la Swapo en 1970, puis sept ans plus tard au bureau politique, il suit parallèlement un entraînement militaire en Tanzanie et en Zambie.
Au début des années 1980, Pohamba reprend des études à l’université de l’Amitié des peuples (Lumumba) à Moscou et décroche un diplôme de sciences politiques. Sur le chemin du retour, il s’arrête en Angola pour occuper le poste de secrétaire aux finances de la Swapo exilée. Revenu définitivement en Namibie en 1989, il dirigera la campagne du parti pour les élections qui déboucheront sur l’indépendance.
Sam Nujoma ne sera pas ingrat pour son compagnon de route. Il le nomme ministre de l’Intérieur dans son premier gouvernement, puis lui confie le portefeuille de la Pêche avant de lui remettre celui, très politique, des Terres et du Repeuplement.
Homme de consensus, Pohamba est perçu par les militants comme un pont entre l’ère Nujoma, dont il est un pur produit, et la jeune génération qui attend son heure. Le nouveau chef de l’État a promis de concentrer son action sur l’éducation, la santé, le Black Empowerment et la lutte contre le sida. Il a également exprimé son désir de donner toutes leurs chances aux femmes, notamment dans les entreprises, ainsi que sa volonté de protéger les droits humains et de lutter contre le crime et la corruption. Un programme dans la droite ligne du gouvernement sortant.

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