Sénégal : les Chinois déferlent dans l’arachide

L’arrivée de négociants chinois sur le marché de l’arachide au Sénégal en change la donne. Si les producteurs tirent leur épingle du jeu, l’hégémonie des huileries locales est, elle, remise en cause.

Une Sénégalaise trie des graines d’arachide. © AFP

Une Sénégalaise trie des graines d’arachide. © AFP

Publié le 29 mars 2013 Lecture : 2 minutes.

Cette année, la production arachidière au Sénégal est bonne (750 000 tonnes) comparée à l’année précédente (+ 28%). Pour les paysans, les prix n’ont jamais été aussi rémunérateurs. Les négociants, surtout chinois, proposent jusqu’à 270 F CFA, le kilogramme d’arachide en lieu et place des 190 F CFA officiels. Du jamais vu ! « Dieu a exaucé nos prières. Nous pourrons vivre dignement des fruits de notre labeur », jubile Sidy Ba, secrétaire-général du Cadre de concertation des producteurs d’arachides du Sénégal (Ccpa).

Venus en force, ces Chinois écument le Groundnut belt (la région de l’arachide) du pays (Kaolack, Fatick, Louga, Diourbel…) à la recherche d’oléagineux. Si 5 139 tonnes ont déjà été expédiées à l’étranger, 53 000 tonnes étaient en instance de départ mi-mars au port de Dakar. Assez pour qu’huiliers et opérateurs privés stockeurs (les intermédiaires entre producteurs et huiliers ; et transporteurs), tirent la sonnette d’alarme.

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Qui sont ces Chinois, négociants d’arachides ?

Visibles depuis l’année dernière, à côté d’acheteurs marocains, vietnamiens et mêmes russes, les négociants chinois sont cette année venus en force au Sénégal. Ils avaient exporté, l’année dernière, 20 670 tonnes de décortiqués. Cette année, les prévisions se montent à plus de 50 000 tonnes.

Si les industriels empruntent de l’argent auprès des banques de la place pour financer leurs approvisionnements en graines par l’intermédiaire d’opérateurs privés stockeurs (Ops), les négociants chinois, eux, viennent avec leur argent et opèrent au bord du champ ou avec l’aide de rabatteurs locaux. Les graines (exclusivement) ainsi collectées, sont directement exportées en Chine, par ailleurs première productrice mondiale d’arachides.

Mais tous les commerçants chinois n’exportent pas. Dans la communauté rurale de Ndinguirail (région de Kaolack), l’un d’entre eux, Tang, affirme avoir investi, sur 7000 m2, plus d’une centaine de millions de F CFA, dans la construction d’une unité de transformation de l’arachide en huile et pâte, destinées au marché local.

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Industrie locale

L’enjeu ? La préservation de l’industrie locale avec ses dizaines de milliers d’emplois et la constitution d’un stock semencier pour le prochain hivernage. « Nous ne sommes pas contre la libéralisation du marché de l’arachide, soutient une source au sein de Suneor (ex Sonacos). Il faut l’encadrer et permettre un approvisionnement correct des industries locales ».

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La filiale sénégalaise du Groupe Advens affichait, pour cette campagne, un objectif de collecte de près de 100 000 tonnes (40 milliards de F CFA), mais demeure loin du compte : elle n’a recueilli que moins de 50 000 tonnes. Idem pour Novasen qui prévoyait de collecter 100 000 tonnes (pour 25 milliards). Elle n’en a obtenu que 15 000 tonnes !

Compétitivité

Les différents acteurs de la filière en appellent aujourd’hui à de larges concertations. « Les paysans doivent être justement rémunérés, mais n’oublions pas que c’est toute une filière qu’il faut préserver », observe le très pondéré Mamadou Jean Ndiaye, le patron du Comité national interprofessionnel de l’arachide (Cnia).

Le directeur de l’Agriculture, Mamadou Diallo, reconnaît, lui aussi, la nécessité de se concerter afin de trouver un prix d’équilibre pour la survie de la filière. Mais n’en pense pas moins que les huiliers, pour rester compétitifs, doivent être plus agressifs en matière de prix ».

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