Le cas espagnol

Publié le 28 mai 2006 Lecture : 2 minutes.

Jamais l’archipel espagnol des Canaries, au large de la côte atlantique de l’Afrique du Nord, n’avait été soumis à pareille pression. Depuis janvier, plus de 7 500 émigrants clandestins ont été interceptés juste avant de débarquer sur les îles, contre 4 715 en 2005.
Ouest-Africains pour la plupart, les clandestins voyagent à bord de pirogues parties de Mauritanie mais aussi de Saint-Louis du Sénégal. « Depuis que, début octobre 2005, Rabat et Madrid ont verrouillé le détroit de Gibraltar et la côte atlantique du Maroc, les candidats à l’émigration ont trouvé ce moyen de gagner l’eldorado européen », explique un journaliste espagnol. Alarmé par cette nouvelle filière, le gouvernement du socialiste José Luis Zapatero s’efforce d’obtenir une « implication accrue » des capitales africaines concernées. À cet effet, il a procédé à un spectaculaire redéploiement diplomatique en Afrique subsaharienne. Poids lourd de la diplomatie madrilène, Miguel Angel Mazarambroz est arrivé, le 21 mai, à Dakar pour y diriger une « cellule de crise » qui s’occupera du Sénégal, de la Gambie, du Cap-Vert, de la Guinée-Bissau, de la Guinée et du Niger. Parallèlement, l’Espagne entend ouvrir une ambassade au Mali et rouvrir sa chancellerie à Khartoum. Histoire de renforcer sa présence diplomatique au sud du Sahara, qui, jusqu’ici, se limitait à huit pays : Cameroun, République démocratique du Congo, Côte d’Ivoire, Gabon, Ghana, Guinée équatoriale, Nigeria et Sénégal.
Mais c’est Mazarambroz, dont la mission à Dakar durera de trois à six mois, qui sera l’interlocuteur de toutes les capitales ouest-africaines. Objectif : amener ces dernières à signer avec Madrid des accords de rapatriement semblables à ceux déjà conclus avec le Nigeria, le Maroc, l’Algérie et la Mauritanie. Nouakchott est même allé plus loin dans sa coopération avec Madrid. Depuis le 16 mai, pour tenter d’intercepter les « pateras de la mort », des bâtiments de la marine mauritanienne patrouillent de conserve avec ceux de la Guardia civil.
Madrid avait déjà fait entendre sa voix sur cette question. Le 17 mai, Miguel Angel Moratinos, le chef de la diplomatie, a en effet profité de la présence simultanée à Paris des présidents sénégalais (Abdoulaye Wade), malien (Amadou Toumani Touré) et bissauguinéen (João Bernardo Vieira) pour leur remettre une lettre de Zapatero. Sur un ton assez inhabituel, ce dernier exhorte ses interlocuteurs à assumer leurs responsabilités face à cette « crise humanitaire » en adoptant des « mesures urgentes », notamment le rapatriement des clandestins. Du côté africain, on doute cependant que la solution préconisée soit suffisante. Le président Wade soutient que l’Espagne devrait financer des projets d’infrastructure susceptibles de créer de nouveaux emplois dans son pays si elle veut endiguer les flux de candidats sénégalais à l’émigration illégale.

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