Un empire à reconstruire

Publié le 28 janvier 2007 Lecture : 2 minutes.

La pierre qui rend fou a fait le malheur de la République démocratique du Congo (RDC). Pour mettre la main sur ce trésor à l’éclat éternel, armées étrangères, rebelles et troupes gouvernementales se sont entredéchirés et ont plongé le pays dans le chaos après la chute du président Mobutu en 1997. Les diamants, au même titre que les autres minerais du sous-sol congolais, ont largement contribué au financement du conflit et abondamment enrichi les seigneurs de guerre. Importations illicites en provenance de pays voisins producteurs comme l’Angola, exportations clandestines en direction d’Anvers, via le Congo-Brazzaville ou bien transitant par les pays des Grands Lacs, « le commerce du caillou » a donné naissance à un trafic régional évalué à plusieurs milliards de dollars.

En 2003, changement de cap. Kinshasa adhère au Processus de Kimberley pour que les revenus du diamant contribuent, enfin, au développement économique et ne soient plus facteur d’instabilité. Deux ans plus tard, la vente de 30 millions de carats a rapporté 1,2 milliard de dollars, soit 71 % des exportations nationales. Plus de 25 millions de carats proviennent de l’extraction artisanale. Véritable eldorado minéral situé dans le centre du pays, la région du Kasaï a vu affluer des centaines de milliers de « creuseurs » depuis la libéralisation du diamant décidée en 1984 par le maréchal Mobutu. Tout le monde a droit au rêve à condition de payer une dîme aux chefs coutumiers. Armés de pioches, habillés en guenilles, ces mineurs de fortune risquent leur vie pour quelques dollars par jour. Bien peu font fortune. Ce sont les « souteneurs » qui encaissent les dividendes en allant vendre les gemmes dans les bureaux d’achats de la capitale. « Ce commerce n’a pas engendré de bénéfices significatifs parmi la population congolaise », déplore Global Witness.
La Société minière de Bakwanga (Miba), créée par les colons belges au début du XXe siècle, a bien du mal à payer ses 6 000 employés. Cette gigantesque mine, implantée sur une concession de 45 000 km2, a vu sa production chuter de 18 millions de carats, dans les années 1960, à moins de 6 millions actuellement.

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Autour de la zone interdite, le Polygone V, des gardiens chassent à grands coups de bâtons des milliers de miséreux. Certains finiront par pénétrer dans l’enceinte moyennant un bakchich. Les militaires prélèvent leur dû, qu’ils iront boire le soir venu. La ville de Mbuji-Mayi et ses 3 millions d’habitants se sentent abandonnés par le pouvoir central et font semblant de croire au mirage du diamant.
La Miba est à l’image du pays. À reconstruire. Curieusement, la société israélienne Emaxon de Dan Gertler a obtenu un contrat d’exclusivité sur 88 % de la production pour un prix d’achat moyen de 14 dollars le carat, contre 30 dollars en moyenne pour le diamant artisanal. Seuls 12 % sont vendus directement à Anvers, et les plus belles gemmes destinées à la joaillerie ne représentent que 2 % des pierres congolaises.
Quant à la valeur des diamants, elle est systématiquement sous-estimée par les négociants, qui doivent payer à l’État une taxe à l’exportation de 3,75 % du montant de la transaction. Ce qui représente un sévère manque à gagner pour le Trésor congolais.

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