Avec la complicité du Ghana

Publié le 28 janvier 2007 Lecture : 2 minutes.

La Côte d’Ivoire est le dernier pays au monde où des « diamants de la guerre » continuent d’alimenter les caisses de l’un des belligérants. Bannies des circuits du commerce mondial depuis octobre 2004, les pierres ivoiriennes n’ont plus l’autorisation de recevoir la certification leur permettant d’être exportées. Les milliers de petits mineurs n’en ont pas pour autant arrêté de fouiller le sol autour de Séguéla, Bobi et Tortiya, dans la zone contrôlée par les Forces nouvelles (FN, ex-rébellion), et leurs gemmes transitent par les pays limitrophes.

C’est en 2005 que la communauté internationale saisit la pleine mesure du problème, juste au moment où la Sierra Leone et le Liberia entament leur sortie du club honteux des producteurs de « diamants du sang ».
En octobre 2005, la présidence du Processus de Kimberley (PK) alerte ses membres et appelle à la vigilance : « Il est possible que la production du nord de la Côte d’Ivoire se mêle à des diamants bruts extraits sur les territoires de un ou de plusieurs États membres du Processus. » Dans son rapport de novembre 2005, le groupe d’experts des Nations unies sur la Côte d’Ivoire constate l’évidence : « À en juger par le nombre de puits et de travailleurs en activité, la production s’établit à quelque 300 000 carats par an [environ autant qu’en 2000, NDLR]. Les recettes tirées de cette production illégale de diamants constituent une importante source de revenus pour les FN. » En octobre 2006, le rapport du comité des sanctions est encore plus clair : « Selon le secrétaire général des FN, le dispositif de sécurité [mis en place autour du site de Bobi] devait protéger les ouvriers des querelles auxquelles la découverte de diamants pourrait donner lieu. Or ce que l’équipe a observé ressemblait plutôt à une opération de production structurée et militairement organisée, dirigée par les FN. »
En attendant la mise en uvre de moyens réels pour stopper le trafic (le Conseil de sécurité a décidé d’un embargo, en décembre 2005, qui n’a pas mis fin à la contrebande), les revenus tirés chaque année de la vente illégale de ces gemmes s’établiraient, selon les estimations de l’ONU, entre 10 millions et 23 millions de dollars. Mali, Guinée, Ghana : les portes de sortie des pierres en contrebande sont nombreuses. Lors de la dernière réunion du PK en novembre à Gaborone, c’est Accra qui a été principalement visé comme lieu de transit des diamants ivoiriens.
Membre du PK, le Ghana est en mesure de certifier des diamants, et il est donc aisé pour des dealers en possession de diamants ivoiriens qui ont franchi une frontière poreuse de prétendre qu’ils sont issus du sol ghanéen.

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L’Union européenne, qui a pris la présidence du PK au début de janvier, a donné un mois et demi aux autorités ghanéennes pour s’attaquer au problème. Elle a accru la surveillance des exportations de diamants ghanéens et renforcé la présence policière autour des centres de négoce. Le 14 février, une mission d’experts se rendra à Accra pour s’assurer de la bonne coopération du pays. Le Conseil de sécurité continue de faire planer la menace d’application de sanctions individuelles contre ceux qui s’adonnent à la contrebande, dans le nord de la Côte d’Ivoire. Ils sont identifiés (le Malien Siaka Coulibaly et l’Ivoirien Sekou Sidibé sont fortement soupçonnés par le groupe d’experts de violer l’embargo sur l’exportation de diamants bruts ivoiriens), mais courent toujours.

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