Vivre au pays

Publié le 27 novembre 2005 Lecture : 2 minutes.

Trente ans après son accession à l’indépendance, l’archipel des Comores a presque tout vécu. Le 22 décembre 1974, à l’issue du référendum d’autodétermination, le nouvel État se voit amputé de l’île de Mayotte, celle-ci décidant de rester dans le giron français. Quelques mois plus tard, le 3 août 1975, il subit un deuxième traumatisme : vingt-sept jours seulement après la proclamation de l’indépendance, Ali Soilih renverse le président Ahmed Abdallah avec l’aide des mercenaires de Bob Denard. Cet épisode constitue le point de départ d’une série de coups d’État dans l’archipel, une « spécialité » dont il semble s’être fait le triste champion.
Depuis cet avènement particulièrement heurté, le pays a été l’objet de multiples tentatives de déstabilisation, la dernière en date – la proclamation de l’indépendance par les sécessionnistes d’Anjouan en août 1997 – ayant failli lui être fatale. Toutefois, après huit ans d’un laborieux processus de réconciliation, la poussée de fièvre autonomiste semble s’apaiser. L’Union comorienne s’est dotée d’institutions qui, malgré leurs imperfections, ont permis d’associer les trois îles à la gestion du pouvoir. De quoi redonner à l’État une certaine crédibilité sur la scène internationale, et lui permettre, aujourd’hui, de solliciter ses partenaires au développement.

Mais si la majorité des Comoriens est convaincue qu’il est temps de tourner la page, le pays n’est pas encore tiré d’affaire. Environ 45 % de sa population vit toujours en dessous du seuil de pauvreté. Certes, elle peut compter sur l’aide de sa diaspora. De Zanzibar à Marseille en passant par le golfe Persique, entre 150 000 et 250 000 Comoriens, poussés par l’instabilité politique chronique de leur mère patrie, vivent hors de l’archipel. Et transfèrent en moyenne, chaque année, 22 milliards de francs comoriens à leurs familles restées au pays, soit près de 16 % du PIB. Mais ce coup de pouce extérieur ne saurait suffire. La preuve : les côtes mahoraises, situées à moins de 50 kilomètres d’Anjouan, font toujours l’effet d’un véritable aimant sur les plus déshérités de l’archipel. Situé à proximité de Mayotte – donc de la France et du fameux « espace Schengen » -, le pays reste sujet à de fortes vagues migratoires qui poussent une grande partie de sa jeunesse vers des horizons réputés plus sereins.
La conférence des bailleurs de fonds, qui doit se tenir à Maurice le 8 décembre prochain, vise à redonner au pays les moyens de ses ambitions. Pour Moroni, le défi consiste notamment à garder ses jeunes, afin de mettre cette force de travail au service de son propre développement. Lorsque ses diplômés cesseront de vouloir enseigner en France, que ses ouvriers agricoles ne feront plus la plonge dans les restaurants de Mamoudzou (Mayotte) et que ses étudiants n’iront plus s’inscrire dans les universités d’Islamabad ou de Téhéran, alors les Comores seront enfin devenues un pays stable.

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