Blair filtre l’info

Publié le 27 novembre 2005 Lecture : 2 minutes.

Dans son édition du 22 novembre, le quotidien britannique Daily Mirror a révélé l’existence d’un mémorandum classé top-secret du cabinet du Premier ministre Tony Blair. Ce document de cinq pages rapporte une conversation entre le locataire du 10, Downing Street et celui de la Maison Blanche, le 16 avril 2004, à Washington. Durant cet échange, George W. Bush aurait émis la suggestion de bombarder le siège de la chaîne qatarie Al-Jazira, à Doha. Motif : elle avait osé diffuser les images d’une foule dansant autour de quatre cadavres calcinés de paramilitaires américains, à Fallouja, en Irak. Selon le quotidien britannique, Blair aurait dissuadé le président américain en arguant des conséquences imprévisibles d’un tel acte. L’information fait le tour des rédactions. Le Guardian et le Times s’intéressent à l’affaire et s’apprêtent à prendre le relais. Mais le jour même, lord Goldsmith, conseiller juridique du gouvernement, informe les médias britanniques que la diffusion de toute information relative à ce mémorandum tomberait sous le coup de « la loi sur les secrets officiels ». Éditeurs et journalistes se plient à la volonté de lord Goldsmith, mais n’en pensent pas moins : « Faire mon travail peut m’amener en prison », titre ainsi le Guardian du 23 novembre.
Jamais Blair n’a eu recours à la censure, même au plus fort de la guerre d’Irak. Sa soudaine fébrilité tend à accréditer les révélations du Daily Mirror, que le porte-parole de la Maison Blanche Scott McLellan, qui présente son patron comme « le chantre de la liberté d’expression », a naturellement qualifiées de farfelues. Seulement voilà, l’aviation américaine a déjà bombardé « par erreur » à deux reprises des locaux appartenant à Al-Jazira – en novembre 2001 à Kaboul et en avril 2003 à Bagdad. Tarek Ayoub, reporter vedette de la chaîne, y laissera la vie, et son monteur sera gravement blessé. Les Américains ont en outre demandé, et obtenu, en 2004, d’Iyad Allaoui, alors Premier ministre irakien, une mesure d’interdiction de la chaîne à Bagdad. Enfin, un cameraman soudanais travaillant pour Al-Jazira, Samy el-Hadj, croupit à Guantánamo depuis plus de trois ans.
La chaîne d’info n’a pas tardé à réagir et exige une « explication convaincante » de Londres et Washington. Mais elle est bien seule à protester. Hamed Ibn Khalifa al-Thani, propriétaire de la chaîne et, accessoirement, émir du Qatar, qui abrite le QG des forces américaines au Moyen-Orient, n’a pas jugé utile de commenter l’information. Un allié, ça ferme sa gueule… ou ça ferme sa gueule !

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