Il pleut, il pleut, bergère…

Publié le 27 mai 2007 Lecture : 2 minutes.

J’étais la semaine dernière dans l’échoppe d’un rebouteux, à Azemmour, en train de contempler quelques peaux de lézards momifiés et des flacons de poudre d’os de chacal, quand j’ai entendu à la radio un truc incroyable. Le Premier ministre australien, mister Howard, a demandé à ses concitoyens de se joindre à lui pour prier ensemble afin que la pluie tombe. On répète, pour les cancres et les distraits : John Howard, Premier ministre d’un grand pays occidental qui s’est construit par la règle et le compas, par la science et la technique, par Descartes et Newton, demande à ses compatriotes de tomber à genoux, les mains jointes, pour implorer Dieu d’ouvrir les vannes du Ciel.

Alors moi, dans la boutique de mon rebouteux du Moyen Âge, à Azemmour (c’est à 80 kilomètres au sud de Casablanca), j’ai été pris d’une stupéfaction qui dure encore. N’est-ce pas nous, gens du Tiers Monde, superstitieux jusqu’au tréfonds, adeptes du culte des saints, visiteurs des sorcières et des fqihs à talismans, qui étions moqués par l’Occident, de Boston à Vladivostok, du pôle Nord à Canberra chez l’ami Howard ? Quand nos grands-pères sortaient dans les rues psalmodier la prière du latif pour que les nuages s’ouvrent et que l’ondée s’abatte sur leurs crânes vénérables, n’étaient-ils pas en butte aux railleries et aux sarcasmes d’esprits forts qui ressemblaient comme deux gouttes d’eau, c’est le cas de le dire, à Howard Ier d’Australie ? Mieux (ou pire) : n’est-ce pas au nom de la rationalité occidentale que les ancêtres anglais de Howard ont pris possession de l’Australie, écartant sans ménagement les Aborigènes qui y vivaient depuis quarante mille ans, mais qui n’étaient que des sous-hommes – la preuve : ils se lançaient dans des danses absurdes pour que la pluie tombe ?

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Le rebouteux dans son échoppe m’est apparu soudain comme plus digne de confiance que ce John Howard descendant d’Anglais félons condamnés à la déportation. Franchement, si c’est pour en arriver là, autant qu’il retourne en Angleterre et rende l’Australie aux Aborigènes soi-disant arriérés. D’ailleurs, s’il y a une chose que Howard est sûr de trouver en Angleterre, avec ou sans prières, c’est bien la pluie

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