Faure Gnassingbé : le style et La méthode

Publié le 27 mai 2007 Lecture : 3 minutes.

C’est d’abord par le style que le président Faure Essozimna Gnassingbé a voulu rompre avec son père qui a régné sans partage pendant trente-huit ans. La volonté d’apaisement ne se décrète pas, elle se démontre. Pour mieux se démarquer du « Vieux » et de son encombrant héritage, le chef de l’État a tout d’abord délaissé la résidence familiale de Lomé II pour regagner l’ancien Palais de la présidence, situé sur le front de mer, au cur de la capitale. Les longues files d’attente, les groupes de musique traditionnelle et les cohortes de thuriféraires qui patientaient des journées entières sous le soleil ont disparu. Désormais, les visiteurs attendent sagement leur tour, et les rendez-vous s’enchaînent sans palabres inutiles. Au « Baobab de Pya » a succédé un homme de 40 ans aux allures de technocrate, diplômé en gestion de Paris-Dauphine et de la George Washington University (Washington). Costume-cravate toujours impeccable, il écoute ses conseillers – au premier rang desquels figure son directeur de cabinet Pascal Bodjona -, étudie d’épais dossiers et tranche après avoir consulté son Premier ministre, Yawovi Agboyibo. Le pouvoir absolu n’est plus. Le chef suprême venu du fond des âges a laissé la place à un président pressé d’obtenir des résultats.
Première étape, la réconciliation de tous les Togolais. Pour cela, une commission nationale spéciale d’enquête indépendante sur les actes de violence commis lors de la dernière élection présidentielle a été créée. Un organe de réflexion pour la réhabilitation de l’histoire du pays a été constitué afin de rendre hommage à tous les dirigeants du pays, vivants ou décédés, anciens chefs d’État, de gouvernement et hauts dignitaires. Le 13 janvier 2006, pour la première fois, une messe a été célébrée en l’honneur du président Sylvanus Olympio, assassiné le 13 janvier 1963. Le symbole est fort. Si cette journée – commémorée avec faste sous Eyadéma – demeure la Fête de la libération, les célébrations de l’indépendance du pays, le 27 avril 1960, font un retour remarqué dans le calendrier officiel des festivités nationales. Ce travail de mémoire était un passage obligé avant d’entamer le processus politique. « Après les tumultes et les violences qui ont suivi la disparition du général Eyadéma et qui ont accompagné l’élection présidentielle d’avril 2005, le Togo est désormais en paix et sans doute plus uni qu’il ne l’était. C’est ce dont je suis le plus fier », a déclaré le président. C’est déjà une victoire après une succession aux allures dynastiques.
Une fois passées les élections législatives qui offriront une légitimité politique à tous ceux qui se seront frottés au suffrage universel, le chef de l’État et son gouvernement vont devoir redonner espoir aux 6 millions de Togolais dont plus de la moitié ont moins de 16 ans, pour une espérance de vie de 54 ans. Dans un pays où le revenu mensuel minimum ne dépasse pas 15 000 F CFA (environ 23 euros), où le taux d’alphabétisation est de 53 %, les attentes sont multiples et le défi est énorme. « Plus nous travaillons, plus nous nous développons, plus l’État aura les moyens financiers d’élever le niveau de vie des citoyens », assure le président, qui peut compter sur la bienveillance de la communauté internationale. Si le retour annoncé des bailleurs de fonds se confirme, la funeste parenthèse de l’isolement aura été refermée. Et Faure Essozimna Gnassingbé aura alors prouvé qu’il a su s’affranchir de sa filiation pour exercer le pouvoir en toute légitimité.

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