Agboyibo, le consensus incarné

Publié le 27 mai 2007 Lecture : 2 minutes.

Bien des gouvernements d’union nationale ont accompagné l’histoire mouvementée du Togo. Mais ce que l’on retient d’ores et déjà de l’équipe formée en septembre dernier par l’opposant historique, Yawovi Madji Agboyibo, environ un mois après la signature de l’accord global entre le pouvoir et l’opposition, c’est qu’elle entérine, du moins l’espère-t-on ardemment dans les capitales africaines et européennes, une étape hautement symbolique vers la normalisation de la vie politique de ce pays. La feuille de route remise à cet avocat de 63 ans, ancien bâtonnier de l’ordre du Togo, lors de sa nomination est on ne peut plus claire : diriger la transition de l’ère Eyadéma en douceur et veiller à la bonne préparation des prochaines élections législatives afin de remettre le Togo sur les rails de la démocratisation et de le faire bénéficier de l’aide extérieure interrompue depuis 1993. Cette mission, nul autre que ce défenseur insatiable des droits de l’homme ne pouvait l’endosser.

Né le 31 décembre 1943 à Kouvé, dans le sud-est du pays, Agboyibo est sans doute l’un des hommes politiques les plus doués de sa génération. Il est parvenu en quarante ans de vie politique à s’opposer subtilement au pouvoir omnipotent de Gnassingbé Eyadéma en affichant constamment ses désirs de démocratie dans un pays verrouillé. Catholique fervent, il a toujours été un électron libre dans un microcosme politique dominé par le Rassemblement du peuple togolais (RPT). Député indépendant à l’Assemblée nationale, il se distingue très tôt par ses prises de position libres. Chose impensable en 1989, alors qu’il siège à la Commission des droits de l’homme des Nations unies, il parvient à convaincre le président Eyadéma de l’utilité de créer une Commission nationale des droits de l’homme au Togo (CNDH), dont il assume la première présidence. Il obtient par la suite une amnistie générale pour les exilés ayant fui le pays lors des événements du début des années 1990. C’est à la tête de sa propre formation, le Comité d’action pour le renouveau (CAR), créée en 1991, qu’il entre véritablement dans l’arène politique, s’affichant d’emblée comme un opposant pondéré. Animé par de fermes convictions, il se veut toutefois modéré et ouvert au dialogue. En 1993, sa formation manque de peu de faire basculer l’Assemblée nationale en remportant 36 sièges sur 81. L’alliance avec l’Union togolaise pour la démocratie (UTD) de l’ancien secrétaire de l’Organisation de l’union africaine (OUA), Edem Kodjo, qui aurait pu déboucher sur un tel scénario, échoue. Membre du Comité pontifical justice et paix au Vatican de 1990 à 1995 et artisan de la paix, il est tout naturellement approché par le médiateur du dialogue intertogolais, le Burkinabè Blaise Compaoré, pour diriger les travaux d’où découlera l’Accord politique global signé le 20 août dernier. Une décision qui lui a valu les plus vives critiques d’opposants radicaux mais qui, au final, aura permis de réaliser un rare consensus entre des forces politiques très disparates, y compris en incluant l’Union des forces du changement (UFC) de Gilchrist Olympio.

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