Les IBSA dans un monde de BRICS

Chris Alden dirige le programme sur les puissances émergentes et l’Afrique au South African Institute of International Affairs (SAIIA) et enseigne à la London School of Economics.

Chris Alden. DR

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Publié le 26 mars 2013 Lecture : 4 minutes.

Comme en témoigne le 5e sommet des Brics qui se déroule actuellement à Durban, en Afrique du Sud, la place croissante accordée aux Brics [un groupement de pays émergents qui rassemble le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et, depuis 2011, l’Afrique du Sud, NDLR] dans l’agenda politique sud-africain a tendance à éclipser les autres initiatives du pays à l’extérieur du continent africain. Rien ne pourrait mieux l’illustrer que la situation des Ibsa, une configuration diplomatique de grands pays émergents composée de l’Inde, du Brésil et de l’Afrique du Sud qui ont en commun d’être des démocraties.

Fondée en 2003, l’Ibsa se revendique comme la coalition de démocraties du Sud, portée par des valeurs communes et investie dans le développement : l’Ibsa discute des questions internationales, de la réforme du FMI et de la Banque mondiale et des changements climatiques. Seize groupes de travail ont été mis en place sur divers aspects de la coopération, comme l’administration publique, les recettes fiscales et les services de santé. La création d’un fonds de développement Ibsa, capitalisé par les trois pays et soutenant onze projets sur les trois continents, constitue l’un des points d’orgue d’une coopération au développement tangible. Le sommet annuel, qui implique souvent la participation directe des dirigeants Ibsa, s’est étoffé au cours des dernières années et comprend maintenant plusieurs événements parallèles, incluant les parlementaires, les entreprises et la société civile.

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En invitant l’Afrique du Sud à rejoindre les Brics en décembre 2010, la question des interactions entre les deux groupes s’est bien sûr posée. Les sommets Brics, comme leurs homologues Ibsa, ont eux aussi appelé à la réforme des institutions internationales, critiqué les régimes commerciaux internationaux et ont averti sur la conduite du G7. La future banque de développement Brics, censée différer en termes de portée administrative et d’échelle, est pourtant motivée par la même volonté de mobiliser les ressources des pays émergents, qui a déjà donné lieu au fonds de développement Ibsa. Si Ibsa et Brics ont beaucoup en commun, comme le soulignent les chevauchements croissants dans les agendas de leurs sommets respectifs, il existe bien des différences structurelles entre eux. L’identité Ibsa, soit une coalition de démocraties des pays émergents, est sans doute la différence la plus criante : c’est le facteur qui influe non seulement sur la façon dont les Ibsa sont perçus à l’extérieur, mais également sur les éléments qu’ils prennent en considération.

Certains observateurs diagnostiquent ainsi les Ibsa en phase terminale.

L’enthousiasme sud-africain pour les Brics est évident, notamment pour les possibilités de renforcement des intérêts sud-africains sur la scène internationale. Certains observateurs diagnostiquent ainsi les Ibsa en phase terminale, relégués à une place secondaire dans les hiérarchies politiques étatiques. S’il est envisageable, un tel déclin constituerait une perte considérable en termes d’investissement national. Les synergies, qui ont rassemblé l’Inde, le Brésil et l’Afrique du Sud en premier lieu, demeurent non seulement intactes, mais continuent à faciliter grandement la coopération institutionnelle entre les secteurs étatiques et non étatiques ainsi qu’à renforcer les capacités d’action des gouvernements. Redéfinir la mission des Ibsa en s’appuyant sur les dynamiques initiales du groupe pour le positionner de façon constructive vis-à-vis des Brics lui permettrait de s’engager dans une relation de complémentarité avec ces derniers.

Pour ce faire, il faudrait reconnaître que les forces d’Ibsa résident, d’une part dans leur rôle « d’incubateur à idées » sur la coopération des pays émergents et, d’autre part, dans l’utilisation de ce rôle au bénéfice de leurs citoyens. La relation entre démocratie et développement pourrait être précisée au sein de la question démocratique qui lie les Ibsa. Les Brics mettant l’accent sur la démocratisation de l’ordre institutionnel mondial, les Ibsa pourraient se positionner à l’échelle des métropoles de leurs trois pays ou même de leurs provinces – la deuxième échelle de gouvernement – et se concentrer sur les défis transnationaux du développement auprès de leurs populations. Les Ibsa s’éloigneraient ainsi des discours sur le développement et participeraient plus directement – ce qui est déjà visible dans les interactions entre les groupes de travail des gouvernements des Ibsa – à la mise en œuvre des politiques. Les liens entre la démocratie locale et l’accès aux services, une question déjà au centre des enjeux du développement en Afrique du Sud, seraient concrètement mis en évidence et pourraient être renforcés par le partage d’expériences avec l’Inde et le Brésil. Transparence et responsabilité, deux mots d’ordre des collectivités locales, seraient ainsi davantage inclus dans les discussions sur les dispositifs locaux (logement, services, éducation).

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Pour les Ibsa, cela signifie définir une nouvelle aire de travail, et surtout jouer la carte d’un rôle complémentaire à l’égard des Brics, en saupoudrant les actions des Brics de nouvelles idées, d’expériences et d’une vision tirées d’une proximité avec les communautés locales. Faire évoluer l’Ibsa, en s’appuyant sur les mêmes sentiments qui ont permis la formation du groupe dix ans auparavant, lui garantirait un rôle clef auprès de l’Afrique du Sud.

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