Le temps presse

Publié le 27 février 2005 Lecture : 2 minutes.

La crise togolaise a éclaté le 5 février après la mort du président Eyadéma, qui a régné sur le pays pendant trente-huit ans en maître absolu.
Depuis, le pouvoir est exercé par l’armée et, en son nom, par Faure Gnassingbé et « le groupe du 5 février », selon la juste expression du président de la Commission de
l’Union africaine (UA), Alpha Oumar Konaré.
C’est un pouvoir de fait, récusé par beaucoup de Togolais, qui ont manifesté leur hostilité, par la Cedeao, l’UA, l’Union européenne et le reste de la communauté internationale.
Avec des arguments très forts : il n’est plus permis, au XXIe siècle, ni en Afrique ni ailleurs, de s’emparer du pouvoir et de l’occuper hors de la légalité fixée par la Constitution et sans élections libres, pluralistes et transparentes.
Nous en sommes là depuis trois semaines avec, entre le pouvoir de fait et tous ceux qui, à l’intérieur comme à l’extérieur, le rejettent, un seul point d’accord : la tenue d’élections transparentes dans les deuxmois, c’est-à-dire en avril prochain.
Un point d’accord inutile, au demeurant, car de telles élections ne se tiendront évidemmentpas dans les soixante jours.
Pas avant qu’on soit sorti de la nasse où l’on se trouve.

À l’heure où ces lignes sont écrites, le désaccord persiste sur tout le reste, qui est le plus important : qui exerce le pouvoir d’ici aux élections, et, partant, organise le scrutin dont on attend qu’il accouche des futurs pouvoirs exécutif et législatif ? De
quelles garanties « démocratiques » disposeront les protagonistes, qu’ils aientété dans le passé gouvernants ou opposants ?
Tant que quelqu’un n’aura pas donné à ces questions les bonnes réponses, c’est-à-dire des réponses politiquement correctes et qui reçoivent l’adhésion des intéressés, on n’aura pas commencé à dénouer la crise.
Chaque semaine qui passe sans nous rapprocher de la solution est une semaine perdue : les parties en présence s’installent dans des postures de défi et d’affrontement ; le pays, qui déjà se portait mal, voit son état empirer

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Mais il y a plus menaçant encore : une perspective que j’ai déjà évoquée ici même et qui m’angoisse, raison pour laquelle j’y reviens. Je l’appellerai le risque d’incendie.
Il s’agit de la succession du général-président Lansana Conté en Guinée, pays proche du Togo et en plus mauvais état que lui, dont tout le monde sait :
qu’elle peut survenir à tout moment ;
qu’elle est encore moins préparée que celle du général Eyadéma ;
et qu’elle pourrait conduire, elle aussi, à une prise du pouvoir par l’armée, à laquelle beaucoup semblent d’ores et déjà résignés.

L’UA et la Cedeao ont-elles la capacité de faire face à deux crises de succession simultanées et qui, de surcroît, viendraient s’ajouter à celle dont la Côte d’Ivoire ne parvient pas à s’extraire depuis plus de cinq ans ?
Qui ne voit que ces crises se nourriraient alors l’une de l’autre, propageant l’incendie et transformant l’Afrique de l’Ouest en une autre région des Grands Lacs, qui, elle, est
en zone de turbulences depuis plus d’une décennie ?

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