Le rapport qui accuse

Publié le 26 novembre 2006 Lecture : 2 minutes.

« Insuffisances », « gestion approximative », « primauté de l’intérêt particulier sur l’intérêt général » Le rapport d’une centaine de pages que la Commission nationale d’enquête sur les déchets toxiques d’Abidjan a rendu public le 22 novembre ne ménage pas les responsables du scandale du Probo Koala. En août dernier, 528 tonnes de boues toxiques transportées dans les cales du navire avaient été disséminées à travers Abidjan, provoquant la mort de dix personnes et en contaminant plusieurs milliers d’autres. L’indignation populaire avait été telle que le Premier ministre avait choisi de présenter sa démission et celle de son gouvernement.
Après deux mois d’enquête – 78 personnes ont été interrogées -, la Commission, mise en place par Charles Konan Banny, est parvenue à remonter la chaîne des responsabilités. À chaque étape, depuis l’arrivée des déchets dans le port d’Abidjan jusqu’à leur déchargement, la négligence et la vénalité – bien que le rapport ne donne aucun détail sur d’éventuels actes de corruption – ont été la règle.
Tommy, la société qui a déchargé les déchets, a par exemple reçu des autorités un agrément qu’elle ne méritait pas, estime la Commission, qui met nommément en cause les signataires du document : Tibé Bi Ballou, le directeur des affaires maritimes (aujourd’hui incarcéré), et Anaky Kobena, le ministre des Transports (écarté du gouvernement). Ladite société n’aurait eu aucune chance de décrocher le contrat sans la « bienveillante protection » des autorités portuaires et, en premier lieu, de Marcel Gossio, le directeur général du Port, poursuivent les enquêteurs. Les Douanes et leur directeur, Gnamien Konan, en prennent également pour leur grade pour avoir négligé de contrôler le navire. Une fois débarqués, les déchets n’auraient pu être déchargés si le District d’Abidjan et son gouverneur, Pierre Amondji, n’avaient fait preuve d’une « surprenante indifférence ». Le ministère de l’Environnement et le Centre antipollution (Ciapol) ont quant à eux failli à leur mission de surveillance. Les responsabilités de la société Trafigura sont également établies. L’affréteur néerlandais du Probo Koala a certes informé les autorités ivoiriennes de la toxicité de la cargaison, mais il a enfreint les conventions internationales sur le transport des déchets dangereux.
Reste à savoir quel usage la justice fera des conclusions de ce rapport, qui seront prochainement complétées par celles de la commission internationale chargée d’établir les responsabilités avant l’arrivée à Abidjan. À ce jour, dix-huit personnes ont été inculpées et sept incarcérées. Marcel Gossio, Gnamien Konan et Pierre Amondji, tous proches du président Laurent Gbagbo, ont été suspendus de leurs fonctions. Quel qu’il soit, leur sort aura inévitablement des répercussions politiques.

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