Vos lettres et emails sélectionnés

Publié le 26 mars 2006 Lecture : 7 minutes.

Nous devrions avoir honte
Le développement, ce n’est pas ériger des routes ou des villes modernes, mais plutôt être au chevet des déshérités, faire en sorte que dans les villages les plus lointains l’éducation, la santé, l’eau potable et l’assainissement soient le minimum de biens collectifs garantis par l’État.
Depuis les années 1960, combien de milliards ont été gaspillés ? Combien de dirigeants peuvent montrer concrètement ce qu’ils ont fait en faveur de leur peuple ? Leurs réalisations : guerres tribales, pillage des ressources du pays, clochardisation des populations.
Comme le disait le pape Jean-Paul II, « il existe des droits humains fondamentaux, dont nul individu ne saurait légitiment être privé, car ils sont enracinés dans la nature de la personne humaine et reflètent la demande objective et inviolable d’une morale universelle ». Le respect de la personne, de sa dignité et de ses droits devra toujours nous guider dans nos efforts pour promouvoir la démocratie et construire nos pays. Arrêtons de demander aux autres ce que nous ne faisons pas nous-mêmes. C’est une honte que l’Afrique demande à l’Occident d’arrêter de donner des subventions à ses agriculteurs, alors qu’elle n’a jamais rien fait pour ses propres paysans.
Quel président africain se vante de consommer ce que son pays produit ? Lequel se soigne dans les hôpitaux qu’il a construits ? Lequel fait éduquer ses enfants dans le système qu’il a mis en place ? On dit que l’avantage d’être cadet est de profiter de l’expérience des aînés. Le continent africain se targue des mérites de la révolution américaine, française ou chinoise, car ces peuples ne cessent de nous servir de leçon.
Aujourd’hui, nous, intellectuels africains, devons faire les sacrifices nécessaires pour permettre à nos enfants et petits-enfants de vivre sans avoir à supporter le regard accusateur de bailleurs de fonds.
Abdoulaye Boly, élève ingénieur en génie rural

Bravo la Suède !
L’information suivante est passée largement inaperçue dans la presse. Au lendemain des sanctions économiques prises par Israël et les États-Unis, la Suède a indiqué qu’elle allait augmenter son aide aux Territoires palestiniens de plus de 5 millions d’euros. Selon Peter Lundberg, l’un des responsables de l’agence suédoise d’aide au développement, ce supplément est indispensable, car Israël ne remplit pas son devoir d’occupant. « En vertu de la quatrième Convention de Genève, le pouvoir occupant a la responsabilité de soutenir et assurer la dignité humaine des occupés », a-t-il déclaré. Beaucoup de pays devraient suivre cet exemple.
À l’inverse, enfermer un peuple derrière des murs et l’affamer n’est ni une innovation ni un motif de fierté. D’autres ont eu recours à cette méthode peu glorieuse il y a une soixantaine d’années. Un certain général Stroop à Varsovie, par exemple, cité récemment comme modèle par un officier israélien en charge des Territoires palestiniens ! Quand la communauté internationale fera-t-elle enfin appliquer aux Palestiniens le droit international ?
Jean-Michel Baryla, Puteaux, France

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Drôle de croisade
On sait les pays occidentaux enclins à renverser, avec la complicité d’opposants résidant sur leur sol, des régimes qui se placent à contre-courant de leurs intérêts. La Belgique vient encore de nous en administrer la preuve en autorisant, sur son territoire, au nom de la « démocratie » et de la « liberté », le lancement d’une croisade (voir la rubrique Confidentiel de J.A. n° 2353) en vue du renversement du régime du président Bachar al-Assad. Les pays africains, latino-américains, arabes pourraient-ils accorder des facilités opérationnelles aux Basques, aux Corses, aux Amérindiens afin qu’ils s’emparent du pouvoir, au nom des mêmes principes, sans s’attirer les foudres internationales ?
Jean Beauval Atiock, Douala, Cameroun

Le Danemark est un beau pays
Qu’est-ce qui a poussé ce journal danois à publier des caricatures diffamatoires du prophète Mohammed ? Surtout en ces temps critiques où, depuis le 11 septembre 2001, une certaine islamophobie galopante, charriée par des alarmistes bien-pensants, voit en chaque musulman un ennemi potentiel de l’Occident.
Dès lors que George W. Bush a lancé sa « croisade » sans merci contre le terrorisme, stipulant que ceux qui ne le suivent pas sont contre les États-Unis et par conséquent contre l’Occident, on a vu naître en Europe un manichéisme pseudo-religieux que les ténors de l’extrême droite exploitent de plus en plus pour faire croire aux naïfs que les musulmans menacent la civilisation occidentale, ses valeurs universelles de droit, de liberté et de tolérance.
Ce qui m’étonne, c’est que les caricatures proviennent du Danemark. Ce plus petit pays scandinave est l’un des plus anciens royaumes du monde, avec une culture et une histoire multimillénaire, illustrée depuis les Runes jusqu’aux figures emblématiques que sont Søren Kierkegaard, Hans Christian Andersen ou le physicien Niels Bohr, mondialement connus et estimés.
J’ai séjourné plusieurs fois au Danemark depuis 1966 (j’avais 19 ans) et, depuis lors, je garde de ce beau pays et de son peuple la meilleure impression. Les Danois sont industrieux, accueillants, très tolérants et surtout ouverts. Je ne leur connais aucune bigoterie, aucun extrémisme et point de xénophobie. J’ai été émerveillé de voir leur Premier ministre habiter un appartement en plein Copenhague, leur roi monter à cheval dans la cohue et, plus tard, sa fille, la reine Marguerite, se baigner sur les plages publiques et visiter à l’improviste toutes sortes de gens.
Sur le plan religieux, le Danemark tel que je l’ai connu était un havre de paix pour toutes les croyances, leurs tenants et leurs édifices. Des luthériens jusqu’aux orthodoxes, des hindouistes aux bouddhistes, des musulmans aux juifs, tous y trouvaient un abri propice à leur foi, sans heurts, sans préjugés, sans animosité. Ironie du sort ou renversement de l’Histoire, on croit assister à une levée de boucliers d’un fanatisme larvé vis-à-vis de l’islam, mais cela n’engage que ceux qui ne respectent pas les croyances d’autrui. Que les musulmans lésés par ces caricatures s’indignent et protestent massivement, c’est leur droit le plus absolu, mais recourir à la violence et aux incendies ne fait que chauffer l’esprit de ceux qui prévoient le « choc des civilisations », alias l’Islam contre l’Occident.
Le prophète Mohammed aurait dit de ceux qui l’ont caricaturé : « Que Dieu les éclaire, car ils ne savent pas ce qu’ils font. » Jésus, que tout musulman vénère, l’a également dit de ceux qui l’ont fait souffrir. Mais quand on n’a plus le sens du sacré, les figures spirituelles deviennent la proie de l’impéritie.
Ali Smaoui, délégué général de l’Alliance francophone, Gafsa, Tunisie

Danger dépigmentation
À voir aujourd’hui le nombre de produits de beauté éclaircissants sur le marché, l’on comprend l’importance du phénomène de dépigmentation dans nos sociétés africaines noires. Sommes-nous aliénés au point de « torturer » notre peau pour la blanchir ? Car il n’y a pas d’autre mot lorsqu’on voit les pratiques auxquelles s’adonnent les femmes désireuses d’éclaircir leur peau.
À ce jour, faute de recherches, rien ne prouve que ces produits ne soient pas dangereux. Espérons que l’Afrique ne sera pas un jour touchée par une nouvelle pandémie liée à la dépigmentation de l’épiderme.
Elyse N’Guessan, étudiante, Côte d’Ivoire

Ce n’est que du cinéma
J’ai vu le film Marock (voit J.A.I. n° 2354) de Leïla Marrakchi. Il est excellent. Le cinéma est fait pour nous faire fantasmer et rêver : races sans haines, relations sans tabous, vivre d’amour et d’eau fraîche ! Mais que faire avec l’islam, qui interdit à une musulmane d’épouser un non-musulman sauf s’il se convertit avec conviction à l’islam et que faire avec le judaïsme qui interdit absolument la conversion ? Le cinéma ne nous incite quand même pas à nous déconnecter de nos réalités et convictions, à nous en moquer ou à vivre sans repères. Ce film est excellent et idéaliste, même s’il nous heurte et nous bouscule un peu. Après tout, ce n’est que du cinéma, pas d’affolement.
Dr Samir Doghri, El-Mourouj, Tunisie

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Oser dire la vérité
J’ai lu avec beaucoup d’intérêt l’opinion de l’ancien rédacteur en chef de Jeune Afrique qui affirme qu’il faut oser dire la vérité aux Africains (voir J.A. n° 2356). En tant qu’Africain et Burkinabè, j’approuve. Inutile de pleurer un passé qui, au lieu de nous encourager à travailler plus dur, est présenté comme un handicap insurmontable et nous rend incapables de nous dépasser, comme l’ont fait les Asiatiques. Dans une décennie, l’Inde sera une puissance économique incontournable. En Afrique, on dit « Voyez ce que j’ai vécu. Je ne peux plus rien faire. Je suis perdu à jamais. Je n’ai plus de tête pour réfléchir, plus de bras pour construire, plus de pieds pour marcher. » J’ai pitié pour les générations à venir. Elles n’hériteront que pages d’histoire vides ou mal remplies. L’esclavage a de beaux jours devant lui.
Richard Simbiri, Burkina Faso

Quand les méchants font des films
Votre article concernant le film turc Irak, la vallée des loups, (voir J.A. n° 2357) m’a donné envie d’aller le voir. Votre critique est si catégorique qu’on peut se demander si c’est parce que c’est un film turc, ou un message de propagande turque. Il n’y a pas que les Américains qui ont le droit de tourner des « navets » propagandistes. J’ai rarement lu des critiques aussi intransigeantes lorsque Hollywood fait son cinéma… Pourtant, il y a autant de caricatures, et les scénarios ne sont pas toujours à la pointe du réalisme et de l’innovation. Quand les « méchants » sont des Noirs, des Arabes ou des Français, ce n’est pas du racisme. Mais si les Turcs mettent en scène un Juif, c’est de l’antisémitisme. Ah, si maintenant les méchants se mettent à faire des films, où va-t-on ?
Sam Fatz, Bordeaux, France

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RDC : dans les starting-blocks
Tout est enfin prêt pour les élections. Après presque dix ans de « transition », les Congolais n’ont plus le droit à l’erreur, mais doivent se montrer capables de saisir l’occasion qui s’annonce : celle de donner au pays des institutions démocratiques et crédibles, capables de défendre les intérêts d’une population bien trop longtemps clochardisée.
Moise Diyabanza, Matadi, République démocratique du Congo

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