DHL lance l’offensive sur le courrier
Le leader du transport express triple ses points de vente en Afrique subsaharienne. Dans son sillage, UPS, FedEx et TNT voient le continent comme un relais de croissance.
«L’Afrique est en voie d’intégration. » Déjà mille fois entendue, la formule prend une tout autre signification dans la bouche de Charles Brewer, directeur général pour l’Afrique subsaharienne de DHL Express, principal « intégrateur » de la planète. Derrière ce terme aussi flou qu’énigmatique pour le commun des mortels se cachent pourtant quatre des multinationales les plus connues de la planète : DHL, UPS, FedEx et TNT Express.
« Spécialisés dans le transport de messagerie et de fret express, ces opérateurs assurent l’ensemble des prestations logistiques, en porte-à-porte et dans un délai restreint, explique Carlos Grau Tanner, directeur général de Global Express Association (l’organisme qui rassemble les multinationales du secteur). Ils se sont développés durant les années 1980, en réponse à l’émergence d’une exigence de rapidité sur les services postaux à forte valeur marchande. » Avec un succès certain, puisqu’ils couvrent ensemble plus de 70 % d’un marché mondial évalué à près de 175 milliards de dollars (plus de 135 milliards d’euros) chaque année.
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Cette semaine dans Jeune Afrique
Capables de desservir 90 % de la planète en 72 heures, ces groupes gèrent près de 13 millions d’envois quotidiens et disposent d’une flotte estimée à quelque 1 200 avions, dont la moitié pour FedEx. Présents à l’origine sur les marchés développés d’Amérique du Nord puis d’Europe, les quatre piliers du secteur ont progressivement étendu leurs zones de couverture au reste du monde, intégrant l’Afrique dès 1978 avec l’ouverture du bureau nigérian de DHL.
Le continent n’a pourtant jamais pesé bien lourd, ne représentant au mieux qu’un petit pourcentage dans les bilans comptables des grands « expressistes ». Bien qu’affirmant tous être en mesure de desservir en direct l’ensemble des pays africains, « ils sont essentiellement présents par l’intermédiaire de hubs installés dans les capitales des principaux marchés. Au-delà, ils passent par des sous-traitants avec des résultats qui peuvent être très aléatoires en termes d’opérations de dédouanement », a pu constater Alain Grall, responsable des questions de logistique chez Médecins sans frontières (MSF) jusqu’en 2007.
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Mais les perspectives économiques très prometteuses de ces dernières années en Afrique ont poussé les multinationales à y revoir leur organisation. Au moment où le secteur enregistre à l’échelle mondiale ses taux de croissance les plus faibles (à la suite de la crise financière de 2009), le continent apparaît même comme « la dernière frontière à conquérir pour le commerce international », selon Ken Allen, PDG de DHL Express. Premier arrivé et leader du transport express en Afrique avec 40 % du marché, l’opérateur de Deutsche Post est aussi celui qui affiche les projets les plus ambitieux. En tournée sur le continent mi-mars, Ken Allen a annoncé l’élargissement du réseau DHL, passé en quelques mois de 350 à plus de 1 000 points de vente en Afrique subsaharienne, d’après Charles Brewer. Il pourrait compter, à moyen terme, « plus de 3 000 agences ». Ce dernier espère ainsi doper un volume d’affaires qui, avec 300 millions de dollars en 2012, ne pèse que 0,5 % du chiffre d’affaires global de la société.
À l’ombre du numéro un mondial, les autres intégrateurs regardent également l’Afrique avec attention, même si aucun développement significatif n’est attendu dans l’immédiat chez FedEx ni chez UPS. Seul TNT semble se mobiliser. Arrivé il y a dix ans sur le continent, l’opérateur australo-hollandais y possède trois bureaux en propre, en Afrique du Sud, en Égypte et au Kenya ; il a signé en 2011 un accord avec le transitaire français Necotrans pour l’aider à couvrir l’Afrique francophone. Le partenariat concerne actuellement six pays de la zone et « devrait s’étendre à neuf pays supplémentaires lors d’une deuxième phase », précise David El Bez, directeur général de Necotrans, très satisfait de débarquer « sur une filière express très dynamique qui, en Afrique, aligne des taux de croissance à deux chiffres ».
Sud-Sud
D’autant que les flux se diversifient, dans la foulée de la forte hausse des échanges commerciaux avec l’Asie. « Les envois entre la Chine et l’Afrique du Sud ont augmenté de 77 % l’an dernier », cite à titre d’exemple Charles Brewer, qui note également une forte poussée des transferts intra-africains. « Ce sont aujourd’hui les échanges Sud-Sud qui boostent la croissance », confirme Éric Melet, directeur général chargé du développement chez Bolloré Africa Logistics (BAL), qui propose l’ensemble des prestations logistiques sous la marque SDV. En plus d’offrir ses propres services, comme des dessertes aériennes depuis l’Afrique du Sud pour les miniers et pétroliers opérant au Mozambique, BAL tisse des partenariats, « avec UPS au Kenya ou en étant le représentant exclusif de Chronopost au Cameroun et au Sénégal », reprend Éric Melet.
Face à cette offensive du privé, les services postaux nationaux font mieux que résister depuis la mise en place en 1998 du réseau Express Mail Service (EMS). Décidés à ne pas se laisser dépouiller d’un segment de marché (l’envoi express et le colis) très rémunérateur et estimé à 12 % des volumes de courrier en Afrique, les services publics ont regroupé leurs moyens, « pour se défendre face aux intégrateurs », affirme Awa Cissé, coordinatrice de l’EMS pour l’Afrique au sein de l’Union postale universelle (UPU). Elle peut s’appuyer sur « les prix les plus bas du marché » et sur un réseau unique en Afrique : les 12 638 bureaux de poste répartis dans les 41 pays subsahariens membres de l’EMS.
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