Itie : les dessous de l’échec gabonais
Le pays, l’un des premiers à s’être engagé, a été radié de l’organisation. Une décision qui sanctionne la baisse de mobilisation des autorités ces dernières années.
l’État gabonais s’était engagé dans l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (Itie) dès 2004. Mais, après le décès du président Omar Bongo Ondimba et l’accession au pouvoir de son fils Ali, en 2009, les efforts s’étaient relâchés. « Le secrétariat de l’Itie et la société civile n’ont pas assez fait oeuvre de pédagogie auprès du nouveau régime », regrette le congolais Christian Mounzeo, coordinateur de la coalition Publiez ce que vous payez. Progressivement, les échanges se sont tendus entre les représentants du gouvernement et la société civile, menée par le bouillonnant Marc Ona Essangui, représentant local de Publiez ce que vous payez. « Les autorités l’ont considéré comme un opposant politique et ont cherché à l’isoler, mettant en danger toute la démarche », poursuit Mounzeo.
Le gouvernement n’a misé « que sur la communication auprès des populations et la diplomatie à l’international, en oubliant le principal : un pays n’est jugé conforme que s’il met en place un groupe de travail tripartite [associant État, compagnies et société civile, NDLR] fonctionnel. Or la société civile et une partie des entreprises en ont été exclues », fustige Marc Ona Essangui. De fait, des groupes comme BHP Billiton (présent dans le manganèse) n’ont même pas été sollicités. « Le gouvernement avait levé le pied sur l’Itie depuis six mois », confirme une source proche du dossier. Même constat à la Compagnie minière de l’Ogooué (Comilog), première société du pays dans le secteur.
Certains groupes, dont BHP Billiton, n’ont pas été associés au processus par Libreville.
Date limite
Contacté par Jeune Afrique, Hyacinthe Mounguengui Mouckaga, vice-président du groupe d’intérêt national, affirmait « ne pas être au courant du motif de la décision de l’Itie », pourtant clairement exprimé par la présidente de l’Initiative, Clare Short, dans un courrier adressé le 3 mars à Ali Bongo Ondimba : le pays avait dépassé la date limite de publication de son rapport, alors qu’il avait déjà obtenu un délai de dix-huit mois.
Dans un e-mail adressé à la présidence le 7 mars, le secrétaire général de l’Itie, Jonas Moberg, a invité le pays à faire une évaluation complète des dysfonctionnements pour en tirer les leçons. Selon Tim Bittiger, directeur régional du secrétariat de l’Itie pour les pays d’Afrique francophone, « il est peu probable que le Gabon puisse adhérer de nouveau à l’Itie avant deux ans ».
Cela ne serait cependant plus une priorité pour le gouvernement, assure un cadre minier occidental actif à Libreville. Car les multinationales déjà présentes ne partiront pas. Et le mégaprojet minier de fer de Belinga ne démarrera pas avant deux ans. « Pour les plus petits projets, le Gabon peut toujours trouver des investisseurs, asiatiques notamment, peu désireux de faire oeuvre de transparence », estime-t-il.
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