Le Juif, l’Arabe, le Noir, ou les bâtards de la République
La France doute. La France a peur de ses immigrés et ne croit plus à l’intégration républicaine, mais ne veut pas entendre parler de la discrimination positive que tous les autres pays confrontés aux difficultés d’intégration des minorités (États-Unis, Angleterre, Inde, Brésil, Afrique du Sud…) ont adoptée. Elle doute d’une partie de ses enfants et les considère comme des étrangers. Marianne a, en son sein, une foultitude de bâtards qui sont venus d’ailleurs et ne sait comment les traiter. […] La France a trois bâtards, du moins elle les prend pour tels. Elle les prend pour tels parce qu’ils viennent d’ailleurs, c’est-à-dire d’un autre lit, c’est-à-dire de ses aventures lointaines avec d’autres contrées. Ils ne sont pas les fils légitimes de dame Marianne. Ils ne peuvent chanter Nos ancêtres les Gaulois. Et comme c’est souvent le cas dans une filiation naturelle, les relations sont teintées de culpabilité de la part du père et d’une certaine perversité de la part des fils. Les trois bâtards de la France ne sont pas des indigènes de la République. Ils en sont bien des fils. […] Les trois bâtards de la France sont donc le Juif, le Beur et le Noir. S’il fallait donner un nom à chacun de ces fils par rapport à ses relations avec le père, le Juif serait le bâtard maître-chanteur ; l’Arabe serait baptisé sans conteste le bâtard méchant, et le Noir, le bâtard pleurer-rire. Des surnoms que ces enfants, qui n’ont pas choisi leur condition peu enviable, endossent malgré eux.
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