La retour du dessin animé

Publié le 25 juin 2006 Lecture : 3 minutes.

En l’espace d’un week-end, début juin aux États-Unis, le dessin animé Cars a rapporté plus de 60 millions de dollars au studio Pixar, qui l’a produit. Le plus fort démarrage jamais réussi en Amérique par un film tous genres confondus, à la seule exception de Harry Potter and the Prisoner of Azkaban, qui avait obtenu un score légèrement supérieur il y a deux ans. En France, où il est sorti le 14 juin, en pleine Coupe du monde de football, donc avec un énorme handicap pour remplir les salles, il a aussi séduit le public : il a attiré lors de son premier jour d’exploitation deux fois plus de spectateurs que son suivant immédiat, un autre blockbuster américain, Poséidon. Il en sera de même sur l’ensemble de la planète, à n’en pas douter, au fur et à mesure de sa sortie dans tous les pays du monde.
Ce succès doit beaucoup aux qualités du film. Il a été réalisé par John Lasseter, l’un des maîtres du dessin animé, qui est aussi l’un des fondateurs et dirigeants de Pixar, la meilleure maison de production américaine de longs-métrages d’animation en 3D. On connaissait déjà les Toy Story 1 et 2 de Lasseter, où il réussissait à donner un cur et une âme à de simples jouets. Cette fois, il humanise des machines. Ou plus exactement des automobiles, puisque la totalité des personnages mis en scène sont des véhicules motorisés. Jusqu’aux insectes, qu’incarnent évidemment d’anciennes Coccinelles de Volkswagen.
Une fois admis le postulat de départ (les personnages sont des voitures), le scénario n’a rien de révolutionnaire. Il raconte comment un bolide nommé Flash McQueen, parti disputer une course automobile en Californie, se retrouve bloqué à Radiator Springs, une petite ville au bord de la mythique Route 66. Condamné, en raison de dégâts qu’il a provoqués, à passer une semaine à réaliser des travaux d’intérêt général au service de la municipalité. De quoi enrager, d’autant que le lieu, désormais déserté en raison de l’ouverture d’une autoroute, n’abrite plus que des has been, figurés par des autos démodées. Mais ce séjour forcé dans le pays profond changera la vie du très égoïste Flash, qui découvrira à cette occasion le prix des « vraies » valeurs – l’amitié, l’entraide, l’humilité…
L’intérêt de Cars ne tient donc pas à l’histoire, même si celle-ci, fondée sur une approche nostalgique de la réalité, propose indirectement une critique virulente de l’Amérique du dollar et des winners. En revanche, le traitement du récit mélange avec brio une animation en 3D d’une rare virtuosité avec un style narratif plein d’humour et de trouvailles originales.
La réussite du film est aussi celle du genre cinématographique auquel il appartient. Tout comme le documentaire, qui connaît une nouvelle jeunesse depuis quelques années, le dessin animé profite aujourd’hui d’une petite révolution, qui a élargi considérablement son public. Le progrès technique (l’animation en 3D grâce aux technologies numériques), l’apparition d’une nouvelle génération d’auteurs, le choix de s’adresser non seulement aux enfants mais aussi aux adultes, voilà, parmi d’autres, des facteurs qui lui ont permis de rivaliser à nouveau avec les autres productions cinématographiques. Le succès de Pixar – cofondé, ce n’est pas un hasard, par Steve Jobs, président d’Apple – est à cet égard emblématique. Il a d’ailleurs été tel que ses dirigeants ont été appelés par ceux de Disney afin de sauver l’ancienne entreprise phare du secteur, en danger de disparition.
Ce renouveau de la production de dessins animés, que le public a plébiscité depuis les succès planétaires de Toy Story 2 et de Shrek, ne touche pas que les États-Unis. Il est également patent dans de nombreux autres pays, à commencer par le Japon (qui n’a entendu parler des superbes films de Miyasaki ?) ou la France (où le succès des deux Kirikou a aidé à multiplier les projets, et où les dessins animés représentent désormais plus de 10 % des entrées en salles). Un signe ne trompe pas : les gestionnaires comme les créateurs n’évoquent plus une niche – le film pour enfants – quand ils se préoccupent de l’avenir de l’animation mais le cinéma tout court. Un genre aussi noble que les autres.

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