Ségo ou Sarko
Bien malin qui pourrait dire aujourd’hui qui, de Nicolas Sarkozy ou de Ségolène Royal, deviendra le 6 mai 2007 le sixième président de la Ve République. La consultation mettra aux prises un homme et une femme jeunes (la cinquantaine) qui brigueront pour la première fois la magistrature suprême. Grâce à son expérience de ministre d’État (Intérieur, Économie et Finances), Sarkozy possède un léger avantage sur sa rivale, qui n’a jamais dirigé que des ministères de second plan (Affaires familiales, Enseignement scolaire).
Même si ses proches entretiennent encore le suspense et si lui-même assure que sa décision n’est pas prise, Jacques Chirac sait qu’il quittera l’Élysée en mai 2007. Il est trop âgé, trop usé, pour se représenter. Mais il fera tout, en coulisse, pour déstabiliser Sarkozy, à qui il n’a pas pardonné la « trahison » de la présidentielle de 1995, quand son ex-protégé lui préféra Édouard Balladur. Problème : aucun des scénarios envisagés jusqu’ici pour barrer la route à « Sarko » ne semble fonctionner. Carbonisé depuis la crise du CPE (contrat première embauche), Dominique de Villepin, le chef du gouvernement, est hors jeu. Michèle Alliot-Marie, la ministre de la Défense, qui s’imaginait bien reprendre le flambeau gaulliste, a été refroidie par les sifflets qui ont ponctué son intervention devant le conseil national de l’UMP, en novembre. Les chiraquiens fondent sur elle leurs derniers espoirs, mais elle n’ira pas jusqu’à se suicider politiquement en se présentant sans l’investiture du parti contre le leader naturel de la droite. À gauche, Ségolène, en apesanteur dans les sondages, a fait place nette.
L’UDF François Bayrou rêve toujours d’être le « troisième homme », mais sa candidature, piégée par la bipolarisation du débat, ne décolle pas. À cinq mois du scrutin, Jean-Marie Le Pen se maintient à un niveau élevé dans les sondages (entre 10 % et 15 % des intentions de vote) et devrait réaliser un score comparable à celui du 21 avril 2002. Mais le réflexe du vote utile, à droite comme à gauche, devrait compromettre ses chances de se hisser au second tour.
Alors, Nicolas ou Ségolène ? La « rupture tranquille » ou l’« ordre juste » ? Cruciale pour l’avenir d’une France en proie au doute, l’élection risque de se limiter à un duel d’image entre deux coqueluches des médias.
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