L’élève et son maître

Publié le 24 décembre 2006 Lecture : 2 minutes.

Avec Moustapha Niasse plus volontiers qu’avec les autres chefs de file de l’opposition « significative » (mais pas avec Idrissa Seck, son ex-bras droit devenu son ennemi intime), le président Abdoulaye Wade rêve de constituer un « ticket » pour la présidentielle de février-mars 2007. Et, accessoirement, pour les législatives, qui auront lieu à la même date – elles ont été officiellement reportées pour des raisons financières.
C’était sans doute l’objectif du dialogue que le chef de l’État a engagé, début novembre, avec ses opposants, invités à rejoindre le gouvernement d’union qu’il souhaite constituer. Certains, comme Abdourahim Agne (PR) ou Serigne Mamoune Niasse (RP), ont répondu favorablement. D’autres, notamment Ousmane Tanor Dieng (PS), Abdoulaye Bathily (LD/MPT), Amath Dansokho (PIT) ou Moustapha Niasse (AFP), ont poliment décliné. En février-mars 2000, les trois derniers avaient pourtant largement contribué à l’avènement de l’alternance
S’il parvenait à ses fins, Wade aurait les coudées franches pour mener à bien les nombreux chantiers qu’il a lancés, dont l’accueil du sommet de l’Organisation de la conférence islamique (OCI), en 2008. Cela lui permettrait aussi d’isoler Seck. Pour mieux le combattre. Las, la manuvre a déjà tourné court, ou presque. Wade va-t-il louvoyer pour tenter d’imposer ses vues ? Ce n’est guère dans sa nature. À 80 ans, son goût pour la bagarre politique est intact. Sa passion pour le pouvoir aussi.
Ce tempérament entier n’est pas forcément un atout dans la perspective des consultations de 2007. D’autant que l’actuelle équipe gouvernementale manque cruellement d’expérience électorale. Et que ses adversaires, eux, ne manquent pas d’arguments, qu’il s’agisse de Tanor, de Niasse, de Bathily ou de Dansokho. Et surtout d’Idrissa Seck. Ce dernier a été à son école et s’est imprégné de ses leçons au point de devenir son fils spirituel, son directeur de cabinet, puis son Premier ministre. Avant d’être brutalement renié et emprisonné, sept mois durant, sous l’accusation de détournement de fonds et d’atteinte à la sûreté de l’État. Seck a tout pour devenir ce que Wade fut naguère pour Abdou Diouf, son prédécesseur : un caillou éternellement glissé dans sa chaussure. C’est un bateleur, un bretteur hors pair.
Quelle que soit son issue, cet affrontement entre le maître et son élève pourrait faire les affaires de l’opposition. À condition que celle-ci n’aille pas à la bataille en ordre dispersé. En tout cas, elle va devoir convaincre les Sénégalais que sopi (« changement », en wolof, et cri de ralliement de Wade et de ses partisans) rime désormais avec sapi : ce qui n’a plus de goût, ce dont on a assez.

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires