Robbe-Grillet et l’Afrique
Le « pape » du Nouveau Roman est mort le 18 février. Écrivain, scénariste, il était aussi un spécialiste des bananes de Guinée…
Publié le 24 février 2008 Lecture : 1 minute.
Alain Robbe-Grillet vient de mourir, à 85 ans, d’un accident cardiaque ; « pape » du Nouveau Roman, scénariste et inspirateur de films d’avant-garde comme L’Année dernière à Marienbad ou Trans Europ-Express, il avait été élu en 2004 à l’Académie française, mais n’y avait pas été reçu, ayant refusé de revêtir l’habit vert traditionnel.
Le célèbre écrivain, controversé pour ses obsessions érotiques et son goût du vin, mais aussi pour ses engagements politiques (il avait signé un manifeste contre la guerre d’Algérie), avait avec la couleur verte un autre lien : l’agriculture. Lorsque j’ai fait sa connaissance, il y a quelques années, lors d’un de ces cocktails littéraires si fréquents à Paris, je me trouvais en face de lui, cherchant un sujet de conversation, lorsqu’un serveur s’approcha, portant un plateau de fruits. Robbe-Grillet leva la main et me demanda : « Voulez-vous une banane Poyo ? »
Comme je m’étonnais qu’il connaisse le nom d’une variété de ce fruit, il me dit : « C’est que vous ne savez pas que j’ai terminé en 1945 mes études d’ingénieur agronome, et que je me suis spécialisé très tôt dans la banane. À la fin des années 1940, j’ai perfectionné mes connaissances de ce fruit dans un pays qu’évidemment vous ne connaissez pas, la Guinée » Il fut stupéfait lorsque je lui dis qu’il devait avoir fait son stage à l’Institut des fruits et agrumes tropicaux (on disait encore coloniaux), à Foulaya, près de Kindia. Après que je lui eus expliqué mes liens avec la Guinée, nous eûmes deux bonnes heures de conversation sur ce pays et sur la banane « Je n’ai jamais décrit les magnifiques paysages guinéens dans mes romans, mais ils transparaissent dans la plupart de mes uvres qui se situent sous les tropiques, précisa-t-il. Malheureusement, je n’y suis jamais retourné. Mais c’est tout un pan de ma jeunesse. »
