L’heure de vérité approche

Ils incarnent deux France que tout oppose…

Publié le 23 octobre 2005 Lecture : 2 minutes.

Hollywood n’aurait pu rêver deux personnages plus différents que le ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy et le Premier ministre Dominique de Villepin. La rivalité entre les deux responsables français est un peu l’illustration de l’Europe d’aujourd’hui, qui veut le changement mais renâcle à le mettre en oeuvre.
Sarkozy pense que les Français rêvent de modernité et se fait l’avocat d’une rupture avec le passé. Fier de ses origines étrangères, il se targue de n’être issu ni de l’élite ni de la haute administration, et s’inspire des succès anglo-saxons en matière de sécurité et d’économie. Ce qui lui vaut la faveur du patronat. Il a durci sa politique en matière d’immigration et de sécurité, s’attirant le soutien de la droite et de l’extrême droite, au risque de s’aliéner l’électorat centriste. Il bénéficie de l’appui de son parti, l’UMP, et reste populaire parmi les militants.
Mais les Français ne sont peut-être pas prêts à un changement aussi radical : il n’est pas exclu que Villepin leur convienne davantage. Sa prestance et sa grande taille sont des atouts médiatiques et suscitent la nostalgie d’un temps où la politique n’était pas l’apanage des politiciens. Sa force réside dans ce mélange ambivalent de l’idée gaullienne d’une grande puissance différente et de l’envie confortable de ne rien changer. Dans un pays anglo-saxon, ce poète aristocrate paraîtrait incongru. Pas en France, où le « panache » fait partie de l’identité nationale.
Villepin peut parfaitement réussir à transformer ses défauts en atouts. Il ne s’est jamais présenté à une élection ? Cela peut lui permettre d’apparaître comme un homme d’État, non comme un politicien, à l’inverse d’un Jacques Chirac, envers qui il affiche une indéfectible loyauté. De son côté, Sarkozy est perçu comme un politique surdoué mais pas vraiment rassurant. Le facteur personnel sera au final décisif.
Villepin reste pour les Français celui qui a osé dire non aux États-Unis dans son discours aux Nations unies, il y a deux ans. Sarkozy, lui, est surnommé « l’Américain ». Mais la course est loin d’être finie. Le Premier ministre a fort à faire avec les syndicats, capables de paralyser le pays par une grève de grande ampleur. Et il lui sera difficile de surmonter le handicap de n’avoir aucun parti derrière lui. Pour Sarkozy, le résultat ambigu des élections allemandes n’augure rien de bon. Les Français peuvent fort bien voter comme leurs voisins, qui ont préféré le changement en douceur aux réformes radicales. Une formule que Villepin personnifie sans doute mieux que lui.

* Conseiller spécial à l’Institut français des relations internationales (Ifri).

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