Les dessous de la planète

Un bel ouvrage de géopolitique, à la cartographie foisonnante et ingénieuse.

Publié le 23 octobre 2005 Lecture : 2 minutes.

Pour avoir lancé et réussi son émission sur la chaîne Arte, Le Dessous des cartes, Jean-Christophe Victor est aujourd’hui en France l’un des plus grands experts en géostratégie. Il est peut-être celui qui connaît le mieux la marche physique de la planète, son « anatomie ». Car, contrairement à de nombreux prétendants, prophètes en déclin ou simples idéologues masqués, Jean-Christophe Victor s’en tient aux faits, donnant par là même à son émission ce caractère parfaitement lisible et équilibré, tant il sait se dégager des compromissions de doctrine des autres tribuns.
Toutes ces qualités, nous les retrouvons dans l’atlas géopolitique qui vient d’être conjointement publié par Arte-Éditions et Tallandier, et qui s’appuie sur le savoir-faire de l’équipe du Dessous des cartes, en particulier Virginie Raisson et Frank Tétart. Plus de quatre-vingts personnes ont contribué à la conception et à la réalisation de cet ensemble avec sa photographie du présent et sa projection dans le futur. Au total, 50 chapitres et quelque 300 cartes réalisées sur mesure, sous la houlette de Frédéric Lernoud et du Fonds Oxford Cartographers. Ceux qui connaissent la difficulté de projeter sur une carte les maux de la planète, ses convulsions, mais également ses réussites et ses triomphes devraient saluer cette dernière performance éditoriale.
Comme on devait s’y attendre, l’aire islamique, en forte activité, a été largement couverte par l’ouvrage : Proche- et Moyen-Orient, Pakistan, Afghanistan, Balkans, Turquie. Grâce à son pétrole, la monarchie saoudienne a bénéficié d’un focus détaillé, contrairement à l’Afrique, traitée en tant que continent (à l’exception notable du Burkina Faso et du Sénégal). À propos d’islam, l’équipe du Dessous des cartes subit la mauvaise influence de « savants » qui réduisent artificiellement l’influence arabe, au prétexte que l’ethnie arabe qui a pourtant produit l’islam est minoritaire. C’est compter sans la complexité de cette religion qui se décline en langue arabe plus de quatorze siècles après son apparition, c’est aussi compter sans sa civilisation qui rassemble tant de peuples au-delà de la péninsule Arabique. De fait, par je ne sais quel tropisme intellectuel, ces idéologues exagèrent le rôle des minorités (ici, les zaydites, les duodécimains, les alaouites, les chiites en général ; là-bas, les communautés amérindiennes).
Bien sûr, ces quelques remarques ne doivent pas occulter le plaisir que l’on éprouve à la consultation de ce magnifique ouvrage. Son plus grand mérite étant précisément de conduire la curiosité du lecteur vers des terrains encore en friche ou totalement inédits et non pas d’imposer une lecture unique des sujets analysés. Pour un prix très raisonnable, un grand album aéré qui pousse le lecteur à se faire une opinion très structurée sur l’ordre ou le désordre du monde actuel.

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