1 milliard de Chinois

Publié le 23 avril 2006 Lecture : 3 minutes.

En 1966, le chanteur français Jacques Dutronc acquérait la notoriété avec un morceau plein d’humour où il déclamait : « Sept cents millions de Chinois, et moi, et moi, et moi. » Son évaluation de la population de la République populaire de Chine n’était guère éloignée de la réalité, même si, à l’époque, la plus grande incertitude entourait les données démographiques de ce pays. Quelque vingt ans après la prise du pouvoir par les communistes en 1949, Pékin restait en effet coupé de la communauté scientifique internationale. Jusqu’au 29 avril 1982, où, à l’occasion du premier vrai recensement de sa jeune histoire, opération réalisée avec l’aide des organisations spécialisées de l’ONU (à laquelle elle avait été admise en 1971), la Chine populaire faisait savoir au monde qu’elle avait atteint le seuil du milliard d’habitants.

Le gouvernement chinois en profitait pour révéler les résultats, tenus secrets jusque-là, des enquêtes démographiques de 1953 et 1964. En l’espace de trente ans, la population avait presque doublé, l’augmentation totale correspondant à un taux de croissance moyen annuel de 19 pour mille. Mais cette évolution ne s’était pas faite, loin s’en faut, de façon linéaire. Dans les premières années de la République populaire, la natalité était élevée, avec un taux annuel de 37 pour mille, mais la mortalité (18 pour mille) l’était également. À la fin des années 1950, la baisse sensible de la mortalité, qui passait à 11 pour mille, alors que la natalité restait soutenue (32 pour mille), portait le taux de croissance naturelle à environ 2,2 % (22 pour mille). L’indice de fécondité était alors supérieur à 4 enfants par femme.
Comme la mortalité continuait de baisser, l’accroissement naturel s’éleva bientôt à 2,5 %. La population chinoise grossissait de plus de 20 millions d’habitants par an. Des programmes de planning familial avaient bien été lancés, tournés essentiellement vers l’élévation de l’âge au mariage, mais la Révolution culturelle de 1966 y avait mis un terme brutal. Ce n’est qu’en 1971 que la politique de contrôle des naissances reprit, son application devenant beaucoup plus stricte à partir de 1974. D’incitative, cette politique devint très contraignante en 1979 avec la politique de « l’enfant unique ». Dans un pays qui sortait de graves disettes (celles de 1960-1961, liées à des calamités naturelles, avaient été terribles), la nourriture était un moyen de pression efficace. Alors que le premier enfant d’une famille se voyait octroyer une ration alimentaire équivalente à celle d’un adulte, le deuxième enfant et les suivants ne recevaient rien.
Les mesures antinatalistes s’accompagnèrent d’une amélioration des services de santé publique, chargés notamment de la distribution gratuite ou à faible prix de moyens contraceptifs. Conséquence de ces dispositions, le taux de natalité tombait de 34 pour mille en 1970 à 18 pour mille en 1979, alors que pendant la même période l’indice de fécondité passait de 4,3 à moins de 3 enfants.

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En se réjouissant de ce coup de frein donné à une démographie galopante, les autorités chinoises se fixaient en 1982 un objectif précis pour 2000 : contenir la population à 1,2 milliard d’habitants. À quelques millions près, elles y sont parvenues. La limitation des naissances est entre-temps entrée dans les murs. Près de 90 % des femmes en âge d’avoir des enfants ont aujourd’hui recours à la contraception. L’élévation de l’âge moyen au mariage (plus de 22 ans, alors que l’âge légal est de 20 ans) tout comme la légalisation de l’avortement ont également contribué à la baisse de la fécondité. L’indice s’élevait à 2,4 enfants par femme vers 1985. Il est tombé à 1,82 en 2001 et s’établirait à 1,6 en 2005. Le Bureau national des statistiques a communiqué début avril les données d’un comptage partiel effectué en novembre 2005. La République populaire comptait 1,307 milliard d’habitants à cette date. Sa population a augmenté au rythme annuel de 6,3 pour mille au cours des cinq dernières années, soit un peu plus de 8 millions de personnes supplémentaires par an.
En 2030, la population de la Chine sera dépassée par celle de l’Inde, qui comptera en 2050 deux cent millions d’habitants de plus (1,59 milliard, contre 1,39). L’empire du Milieu affrontera dès lors des problèmes démographiques d’un tout autre ordre : ceux du vieillissement. En 2040, il abritera quelque 400 millions de seniors de plus de 60 ans.

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