Quand la révolution dévore ses enfants

Publié le 22 octobre 2007 Lecture : 3 minutes.

Ils étaient quatre officiers à prendre les armes pour faire la révolution. Quatre jeunes gradés unis par des liens d’amitié La première rencontre remonte à 1974, alors que Thomas Sankara participe à une guerre ridicule, qui oppose le Mali à la Haute-Volta. Pour dénoncer l’absurdité de ce conflit, des officiers font circuler des tracts à Ouaga. Parmi eux, Sankara et Zongo se découvrent des opinions convergentes.
Trois ans plus tard, lors d’un stage au centre des parachutistes de Rabat, Sankara se lie d’amitié avec Blaise Compaoré. De retour du Maroc, ils se retrouvent au Centre national d’entraînement des commandos (CNEC) de Pô, à 150 km au sud de la capitale. Thomas commande, Blaise devient son adjoint, avant de le remplacer. En février 1981, après le putsch du colonel Saye Zerbo, Sankara est nommé secrétaire d’État à l’Information. Zongo et Compaoré siègent au Conseil national des forces armées. En mai 1982, Sankara démissionne brusquement du gouvernement ; Zongo et Compaoré quittent aussitôt le Conseil.
Le troisième homme à faire partie des compagnons de route de Sankara s’appelle Jean-Baptiste Boukary Lingani. C’est à lui qu’échoit le rôle du grand frère que Thomas n’a pas eu. Il va d’ailleurs contribuer à sa mise en orbite. À l’issue du coup d’État de novembre 1982, le Conseil de salut du peuple (CSP) nomme Jean-Baptiste Ouédraogo chef de l’État. Le commandant Lingani, qui assure le secrétariat permanent du CSP, propose Sankara au poste de Premier ministre.
Mais l’orientation du nouveau régime ne plaît pas au jeune officier, qui n’hésite pas à afficher sa différence. Il est arrêté en mai 1983, avec Zongo et Lingani. Le 4 août, Blaise Compaoré quitte Pô avec ses commandos pour investir Ouaga. Le chef de l’État est neutralisé, et l’ex-Premier ministre, une fois libéré, prend la tête des putschistes. La nouvelle équipe dirigeante se constitue le 24 août. Président du Conseil national de la révolution (CNR) et chef de l’État, Sankara est également ministre de l’Intérieur et de la Sécurité. Compaoré devient ministre d’État délégué à la présidence, sans portefeuille : il est de facto le numéro deux du régime. Lingani, qui est le plus ancien dans le grade le plus élevé, choisit la Défense nationale, et Zongo le ministère des Sociétés d’État.
On connaît la suite. Le compagnonnage prendra fin, quatre ans plus tard, le 15 octobre 1987 avec la mort de Sankara. Mais, le feuilleton ne s’arrête pas là. Le 18 septembre 1989, Lingani et Zongo, respectivement en charge des ministères de la Défense populaire et de la Promotion économique, sont accusés de complot et exécutés. Ils auraient eu l’intention d’attenter à la vie de Blaise Compaoré alors qu’il rentrait d’un voyage en Extrême-Orient. La tentative d’assassinat aurait été découverte par Gilbert Diendéré, responsable de la sécurité présidentielle. Trois jours après la mort des « conjurés », il est nommé secrétaire général du Comité exécutif du Front populaire, c’est-à-dire numéro deux du régime.
Ancien adjoint de Compaoré au centre des paras commandos de Pô, le colonel Diendéré a toujours travaillé dans l’ombre du chef, avec un zèle jamais démenti. À 48 ans, ce fidèle d’entre les fidèles occupe toujours la fonction de chef d’état-major particulier de la présidence du Faso et reste le patron du Régiment de sécurité présidentielle (RSP). Surtout, il est, avec Blaise, l’un des derniers survivants de la fameuse nuit du 4 août.

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