Benjamin Gasamagera

Président de la Chambre des jeunes entrepreneurs

Publié le 22 octobre 2007 Lecture : 3 minutes.

A 41 ans, Benjamin Gasamagera ne jure que par Deng Xiaoping, l’ancien dirigeant chinois qui inspira la politique de la Porte ouverte. Étonnant de la part de ce jeune homme qui n’est absolument pas communiste. L’explication est ailleurs : il est arrivé en Chine au moment où l’empire du Milieu amorçait le tournant historique qui lui a permis d’être aujourd’hui un géant économique à l’échelle mondiale. À l’époque, Gasamagera ne s’imaginait pas qu’il serait un jour à la tête d’une entreprise employant une cinquantaine de personnes et évoluant « à la chinoise ». Ni qu’il ferait partie d’une nouvelle génération d’entrepreneurs rwandais déterminés à relever le défi du développement dans un pays aux ressources limitées.

En 1984, Benjamin Gasamagera participe à un concours pour obtenir l’une des bourses d’études accordées par Pékin au Rwanda. Il est parmi les dix reçus et gagne la Chine. Au bout de six mois, il maîtrise le mandarin et entame une formation d’informaticien. Il remarque que la politique des « Quatre Modernisations » (agriculture, industrie, défense, sciences et techniques), initiée par Deng Xiaoping, porte ses fruits, et note que le pays « a beaucoup à apprendre aux autres sur le plan de l’organisation, de la ponctualité, de la détermination et de la démographie ». Enfin, il retient une leçon : « Pour se faire accepter, il faut être ami avec le peuple qui vous reçoit. » En 1989, son diplôme d’informaticien en poche, il effectue une halte aux Pays-Bas, avant de rentrer au Rwanda, où il multiplie les expériences. Il travaille un temps au ministère du Plan, puis pour le compte du Programme des Nations unies pour le développement (Pnud), avant de se retrouver en Suisse, embauché par le transporteur Danzas. En 1998, Benjamin Gasamagera regagne définitivement Kigali.
Quelque temps après, il se rend compte que son pays importe de grandes quantités de mouchoirs en papier. Dès lors, il comprend que ce secteur présente de fortes potentialités. Il en parle autour de lui et demande à des amis chinois de l’aider à monter une affaire dans ce domaine. Une étude du projet est menée. Résultat : la rentabilité est certaine. Pour démarrer, il faut juste une centaine de milliers de dollars.
En mars 2003, Gasamagera décide de se lancer dans l’entreprise en créant la société Safari Center. Un crédit obtenu auprès d’une banque lui permet de démarrer. Quatre ans après, les résultats sont convaincants. Safari Center produit une gamme de produits de toilette de la marque Supa : papier hygiénique, mouchoirs en papier, essuie-tout, serviettes en papier, serviettes hygiéniques et, bientôt, des couches pour bébés. La production mensuelle, entre 15 et 20 tonnes, c’est-à-dire 30 % à 40 % du marché local, est destinée aux hôtels, écoles, restaurants, hôpitaux Une bonne partie est exportée au Burundi et en République démocratique du Congo notamment. Avec sa cinquantaine de salariés, tous rwandais, Safari Center a un chiffre d’affaires annuel de 1 milliard de francs rwandais (environ 1,5 million d’euros).
Pour réussir, Benjamin Gasamagera a surtout misé sur la qualité de ses produits. Et compris qu’il fallait entretenir un esprit d’entreprise afin d’intéresser tout le monde. Cela passe par des réunions avec le personnel tous les mardis, en plus d’une réunion générale mensuelle. Il met également en pratique ce qu’il a appris des Chinois : la culture industrielle. En même temps, il affirme avoir bénéficié d’un environnement favorable marqué par « un secteur public conscient de la nécessité d’avoir des hommes d’affaires compétents à qui il facilite l’importation des machines et des matières premières, ainsi que le recrutement d’un personnel qualifié ».

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Mais tout n’est pas rose. Vivant dans un pays enclavé, Gasamagera redoute toujours une rupture des stocks (les matières premières mettent trois mois à lui parvenir quand elles sont importées de Chine, et au moins une semaine quand elles viennent du Kenya). Sans oublier les pannes de machines, ainsi que la difficulté à trouver les pièces de rechange et des réparateurs qualifiés. Ce qui n’empêche pas cet adepte de Deng Xiaoping de porter son autre casquette, celle de président de la Chambre des jeunes entrepreneurs. Il veut aider ceux qui en ont les capacités à devenir « les hommes d’affaires du futur ».

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