Au-delà de l’actualité

Publié le 22 juillet 2007 Lecture : 2 minutes.

Une revue est aux antipodes de la culture du zapping. On prend le temps de la lire. C’est en ce sens que le neuvième numéro de La Revue (juillet-août 2007) mérite, autant que les précédents, son sous-titre « Pour l’intelligence du monde ». Au sommaire, des sujets multiples et variés qui font un sort à de nombreuses conceptions simplistes ou idées reçues. C’est le cas du dossier phare sur le Moyen-Orient. Richard Haass, président du Council on Foreign Relations, un influent think-tank américain, établit un diagnostic réaliste, souvent inattendu et toujours convaincant. Les États-Unis devraient faire leur deuil du Grand Moyen-Orient cher à George W. Bush et aux « néocons ».

Mais on aurait tort de s’en réjouir : après l’Irak, démocratie rimera désormais avec anarchie. La « guerre contre la terreur » a donné un sang neuf aux terroristes qui peuvent plus facilement récolter des fonds, étendre leur propagande et accueillir de nouvelles recrues. Richard Haass soutient, arguments à l’appui, qu’avec l’Iran « la diplomatie reste la meilleure option ». Postulat identique au sujet de la Palestine, à condition que les États-Unis se résolvent – ou se résignent – à parler avec le Hamas.
Dans le même dossier, un reportage au Liban permet de mieux saisir ce qui se passe au-delà des luttes tribales. Selon l’ambassadeur de France à Beyrouth, Bernard Emié, « le gouvernement libanais est un homme malade, aux mains d’une représentation nationale paralysée ». On est loin des formules bien ciselées de diplomate. C’est un diagnostic lucide. ?Le pire n’est pourtant peut-être pas à venir. Par crainte de l’« irakisation », les affrontements entre chiites et sunnites pourraient s’apaiser. Autre facteur d’optimisme : la naissance, au pays du Cèdre, ?d’un sentiment patriotique qui traverse les clivages traditionnels.
L’Irak a droit à un traitement particulier. À cet effet, La Revue a sollicité un chercheur du CNRS, sans doute l’un des meilleurs spécialistes de l’ancienne Mésopotamie. Les explications de Pierre-Jean Luizard sont aussi éclairantes que celles de Richard Haass. L’évocation du contexte historique, c’est-à-dire la création en 1920 par le Royaume-Uni d’une entité irakienne fondée sur la domination des sunnites, donne les clés nécessaires pour comprendre l’échec de la politique américaine. Faire l’inverse de ce qu’avait voulu l’Empire britannique n’est pas, George W. Bush l’apprend tous les jours, une garantie de succès.
Sur de nombreux autres sujets, La Revue marque son originalité. Le portrait de Gordon Brown, le nouveau Premier ministre britannique, se distingue dans le flot de littérature publié à son arrivée au 10, Downing Street. On y trouve toute l’histoire de « B and B » (Blair and Brown). Les amis complémentaires, les dissensions entre les deux hommes, le sacrifice de l’un, le cynisme de l’autre, le divorce et, en fin de compte, la survie du couple. Le tout émaillé de citations qui font mouche.

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La Revue se laisse également regarder. Grâce à son « Portfolio » consacré à la Tunisie, cette neuvième livraison offre au lecteur une succession de superbes photographies de Marc Riboud dévoilant le chemin parcouru par le pays depuis son indépendance, le 20 mars 1956. Un demi-siècle de République tunisienne est passé au crible tout en évitant les approches convenues qui font la part belle au manichéisme.
Last but not least, le bimestriel s’autorise des rubriques plus légères. Dans cet esprit, le « Déjeuner avec » nous invite à la table du célèbre footballeur des Bleus et membre du Haut Conseil à l’intégration, Lilian Thuram. On y découvre un intello attachant.

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