Peut-on écrire « une écrivaine » ?

Question posée par Gabriel Poisson, Paris (France)

Publié le 22 janvier 2006 Lecture : 2 minutes.

En décernant leur prix à Nina Bouraoui, les jurés du Renaudot ont-ils couronné « un écrivain » ou « une écrivaine » ? La féminisation des noms de métiers, de titres ou de fonctions dans la langue française est un sujet controversé, car il mêle des problèmes de grammaire et de linguistique à une question de société liée à l’accès des femmes aux activités traditionnellement réservées aux hommes.
Une première circulaire, en date du 11 mars 1986, recommandait aux administrations d’appliquer autant que possible la féminisation dans les textes officiels. Elle n’a guère été suivie d’effets.
En 1998, une seconde circulaire voit le jour. Elle s’appuie sur les travaux d’une commission de terminologie dont les conclusions sont les suivantes :
– Les désignations des statuts de la fonction publique et des professions réglementées ne doivent pas être féminisées, non plus que les noms de fonction dans les textes juridiques en général, pour lesquels seule la dénomination statutaire de la personne doit être utilisée. Les textes réglementaires doivent respecter strictement la règle de neutralité des fonctions, l’usage générique du masculin étant une règle simple à laquelle il ne doit pas être dérogé.
– En revanche, rien ne s’oppose à ce que les appellations utilisées dans la vie courante, à la demande expresse des individus, soient mises en accord avec les sexes de ceux qui les portent. Ainsi l’actuelle ministre de la Défense, Michèle Alliot-Marie, préfère-t-elle se faire appeler « le ministre », alors que Martine Aubry, ancien ministre de l’Emploi et de la Solidarité du gouvernement Jospin et à l’origine de la commission, souhaitait précisément qu’on l’appelât « la ministre ».
Les noms de métier et de profession peuvent, sur le même principe, être féminisés.
Un guide pratique (Femme, j’écris ton nom) édité en 1999 par la Documentation française reprend ces recommandations, à laquelle l’Académie française s’oppose. L’institution fondée par Richelieu estime que la féminisation est absurde, car elle dénie le caractère générique du masculin dans la langue française. Elle critique les propositions de féminisations de noms de métiers, qu’elle considère comme des « barbarismes ».
La position de J.A.I., celle de la presse française en général, est de féminiser dans la mesure du possible. Ainsi écrivons-nous la ministre, la sénatrice, l’ambassadrice (qui n’est plus seulement l’épouse de l’ambassadeur, comme dans l’usage ancien), la secrétaire d’État, la députée, l’écrivaine Le choix se fait au cas par cas : utilisation du terme féminin existant le cas échéant, féminisation sur le modèle de noms de métier existant (boucher, bouchère), ajout d’un « e » final lorsque aucun modèle ne peut être reproduit (professeure, auteure).
Des problèmes subsistent comme dans le cas de « Premier ministre », « Première ministre » nous semblant encore difficile à employer, pour une question de sonorité.
En fin de compte, au-delà des querelles et des points de vue, c’est l’usage qui décide de la pertinence, ou non, de la féminisation.

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