Mahfouz entre en religion
Figure prestigieuse de la littérature mondiale, Naguib Mahfouz (94 ans) adopte une attitude qui, aux yeux de ses confrères, ne rehausse point sa renommée établie d’écrivain moderniste engagé. Le Prix Nobel de littérature (1988) refuse d’autoriser la mise en vente de Fils de la Médina – roman publié en 1959 et qui vient d’être réédité par une maison d’édition cairote – tant qu’il n’aura pas eu la caution de l’université Al-Azhar du Caire, la plus haute autorité de l’Islam sunnite, et celle des Frères musulmans.
Cette position scandalise les écrivains égyptiens. Lors de sa parution il y a quarante-six ans, le livre, jugé à l’époque blasphématoire, avait suscité une levée de boucliers dans les milieux islamiques, qui n’avaient cependant pas réussi à suspendre sa publication sous forme de feuilleton par le quotidien Al-Ahram. Mahfouz, qui n’a d’ailleurs jamais été ménagé depuis lors par les intégristes (ils ont tenté de l’assassiner en 1995), a tenu bon face aux religieux. Aujourd’hui, sa « demande crée un précédent dangereux, car elle donne un pouvoir de censure à Al-Azhar, en opposition à la position des intellectuels », s’indigne l’écrivain Youssouf al-Qaïd. Son collègue Izzat al-Qamhaoui va plus loin : « Naguib Mahfouz trahit son texte », tempête-t-il, en précisant que ce dernier donne ainsi « une autorité illégitime à Al-Azhar d’avoir un droit de regard sur la littérature ».
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